Littérature

Marguerite Duras, Un barrage contre le Pacifique : résumé, personnages et analyse

Page de garde de l'étude critique sur Un barrage contre le Pacifique de Marguerite Duras, avec un récapitulatif, une description des protagonistes et une interprétation analytique.
Ecrit par Les Résumés

L’auteure française, Marguerite Duras a écrit et publié son roman Un barrage contre le Pacifique en 1950, peu après avoir divorcé de son premier mari, Robert Antelme, et épousé Dionys Mascolo (avec qui elle a eu un enfant). Le livre est inspiré de la propre adolescence de Duras en Indochine française, et le personnage de Suzanne est basé sur Duras elle-même. Explorons cette œuvre du XXème siècle ensemble.

Résumé détaillé partie par partie de Un barrage contre le Pacifique de Marguerite Duras

Première Partie

L’arnaque

En Indochine, dans la région de la “plaine de Ram“, une institutrice française, habite avec ses deux enfants, Joseph, âgé de vingt ans, et Suzanne, âgée de seize ans, dans une concession au bord de l’océan Pacifique. Séduit par la vie coloniale, cette institutrice a quitté la France pour l’Indochine avec son mari, mais ce dernier est mort, laissant une mère seule avec deux enfants. Le terrain sur lequel se trouve le bungalow a été acheté par l’institutrice avec toutes ses économies, mais elle a été trompée par de malhonnêtes agents qui ne lui ont pas dit que le terrain était inondé par l’eau de mer lors des grandes marées et que toute culture était impossible. L’institutrice a donc lutté en vain contre le cadastre et a essayé, avec l’aide de paysans locaux et en particulier de son fidèle “caporal“, un Malais, de construire des barricades contre la mer. Cependant, en juillet, la mer a comme d’habitude envahi la plaine et les barricades n’ont pas été assez solides, elles ont été rongées par les crabes des rizières et se sont effondrées en une seule nuit. Régulièrement, la famille a l’habitude d’aller au café de M.Bart en ville de Ram.

Un mariage qui pourrait tout arranger

Un jour, M. Jo, un jeune homme riche mais laid, vêtu d’un costume en tussor, qui conduit une magnifique voiture, passe sur la piste, qui est la seule attraction de cette plaine morne. M. Jo tombe amoureux de Suzanne, mais Joseph le trouve “merdique” et “simiesque“. Suzanne n’en pense pas moins. Malgré cela, la mère semble prête à donner sa fille à M. Jo contre rémunération. M. Jo rend visite à Suzanne tous les jours et fait preuve de beaucoup d’attentions. Il lui propose alors qu’elle lui accorde la possibilité de la voir nue alors qu’elle se lave en échange d’un phonographe. Suzanne accepte. La mère de Suzanne souhaite absolument que le mariage se fasse toutefois le père de M. Jo a d’autres projets pour son fils. D’ailleurs, ce dernier n’est pas sûr d’épouser Suzanne étant donné qu’elle ne semble être intéressée par lui que pour son argent.

Une rupture douloureuse et un diamant à la clé

M. Jo propose à Suzanne de lui offrir un gros diamant en échange de trois jours en sa compagnie. Suzanne en parle à son frère qui, énervé, chasse M. Jo. Humilié, ce dernier repart chez lui en laissant le diamant à Suzanne. La mère de cette dernière cache le diamant et frappe sa fille, prétextant qu’elle a couché avec M. Jo, hors mariage, pour avoir ce diamant. Le lendemain, Suzanne met un terme à sa relation avec M. Jo. Sa tristesse n’atteint pas le cynisme et la cruauté de Suzanne.
La famille finit par partir pour la ville afin de vendre le diamant au plus vite.

Deuxième partie

Le diamant a un “crapaud”

La famille descend à l’hôtel central de la ville tenue par Carmen. Cette dernière, fille de prostituée, est une amie de la famille. Il y a deux ans, elle a dépucelé Joseph. En tentant de vendre le diamant, les bijoutiers y trouvent un “crapaud”, faisant perdre sa valeur de moitié. Le prix du diamant passe de vingt mille à dix mille francs. Désespérée, la mère fait tous les bijoutiers de la ville, mais personne ne veut acheter le diamant pour vingt mille francs. Elle essaie de demander à sa famille de demander à M. Jo une autre bague. Entre temps, Joseph a disparu de l’hôtel. Carmen prend Suzanne sous son aile en lui demandant de sortir de l’emprise malsaine de sa mère. Elle lui offre de beaux vêtements pour que Suzanne puisse aller se promener dans les hauts quartiers de la ville.

Les Hauts Quartiers

Sa première promenade est déconcertante. Elle ne trouve du plaisir qu’au cinéma. Elle voit son frère dans leur voiture avec deux femmes. Ce dernier montre peu d’intérêt à sa sœur.
En ayant pris leur seul moyen de locomotion, la mère et Suzanne restent bloquées à l’hôtel pendant huit jours. Joseph confie à Carmen qu’il est tombé amoureux d’une femme. Carmen présent M. Barnier à Suzanne. Cet homme d’une quarantaine d’années jouit d’une situation confortable et souhaite épouser une jeune française vierge. Bien qu’elle le méprise, Suzanne accepte sa demande de mariage à condition qu’il réalise une lettre à l’intention de sa mère. Toutefois, la mère et Suzanne finissent par refuser le mariage.
De nouveau dans les Hauts Quartiers, Suzanne revoit M. JO. Ils vont au cinéma ensemble, mais Suzanne le repousse lorsqu’il essaie de l’embrasser.

Le diamant est vendu

Au téléphone, Joseph apprend à Carmen qu’il a vendue le diamant à la femme dont il est tombé amoureux pour une valeur de vingt mille francs. Cela permet à la mère de rembourser ses dettes et d’espérer faire de nouveaux prêts. Joseph finit par rentrer et explique à sa mère et à sa sœur qu’il est prêt pour rentrer.
Durant le trajet, la mère évoque tous les nouveaux plans qu’elle a en tête, mais très vite, elle avoue que les banques ont toutes refusé ses demandes de prêt. Joseph leur apprend qu’après avoir acheté son diamant, on le lui a rendu et il le sort de la poche.

Le départ de Joseph

En attendant de retrouver la femme qu’il aime, Joseph revend le phonographe de M. Jo. Joseph confie à sa sœur comment il a rencontré Lina, la femme qu’il aime. Cette dernière était partie au cinéma avec son mari. À la fin de la séance, ils lui ont proposé de venir boire avec eux. Lina s’est arrangée pour que son mari soit ivre mort et ils ont passé huit jours ensemble. Joseph montre à sa sœur la lettre que leur mère a écrite aux cadastres. Il souhaite que sa sœur n’oublie jamais ce qu’ils leur ont fait subir et ce que leur mère a enduré. Joseph finit par partir de la concession.

La mort de la mère

La mère finit par tomber malade et reste alité la plupart du temps. Suzanne attend qu’une voiture s’arrête sur la piste. La mère de Suzanne demande à un homme de la plaine, Agosti, s’il accepte de vendre le diamant au père Bart.
Agosti se rapproche de Suzanne et ils finissent par coucher ensemble. Toutefois, Suzanne lui fait bien comprendre qu’elle ne compte pas l’épouser. Un soir, alors que Suzanne et Agosti rentrent de l’hôtel, ils découvrent la mère de Suzanne dans un coma. Elle finit par décéder quelques heures plus tard.

Le départ de Suzanne

Averti par la mort de sa mère, Joseph revient pour l’enterrer et demander aux habitants de la plaine de tuer les gens du cadastre s’ils venaient à remettre les pieds ici. Agosti demande à Suzanne de rester auprès de lui, mais celle-ci refuse. Elle veut retourner en ville avec son frère et sa nouvelle compagne, Lina.

Présentation des personnages

La mère est un personnage complexe et ambivalent. Elle est décrite comme étant à la fois sainte et folle, aimée et détestée, respectée et dénigrée, et elle a l’air d’être très autoritaire et violente. Elle semble être obsédée par la construction de barrages mais cet espoir l’a épuisée. Elle a également l’air d’être très exigeante et autoritaire envers ses enfants, et elle semble prendre plaisir à éprouver leur patience. En général, il semble que la mère soit une personne très forte et déterminée, mais qui a également des moments de faiblesse et de désespoir.

Joseph est un personnage complexe âgé de vingt ans. Il est décrit comme étant “un peu fou” et capable de violence, mais aussi comme ayant un fort désir de liberté et de rébellion. Il a une relation conflictuelle avec sa mère. Il tombe également amoureux de Lina de manière intense et soudaine. Il incite également les paysans à la révolte. Cela donne l’impression d’un personnage complexe et imprévisible, avec de nombreuses facettes à sa personnalité.

Suzanne est une jeune fille de seize ans qui a été soumise à sa mère et à son influence négative depuis son enfance. Sa mère la frappe et la fascine, et Suzanne a l’impression de subir cette force comme si elle était impersonnelle. Elle finit par se rebeller contre sa mère et peut-être sa négligence a contribué à sa mort prématurée. Suzanne est en proie à l’ennui de vivre et cherche ce qu’elle croit être la “vraie vie” sans pouvoir l’imaginer autrement qu’ailleurs. Elle découvre son corps et le pouvoir de sa beauté, mais n’éprouve aucun désir pour les hommes et se contente d’accepter leur intérêt pour elle. Elle subit “l’imbécillité de l’âge” et accepte passivement sa condition de proie destinée à un mari ou même à tous, comme sa mère la pousse à la prostitution. Elle finit par succomber à cette pression et devient elle-même une souteneuse.

Monsieur Jo est amoureux de Suzanne. Il est décrit comme étant de “faible constitution” et mal fait, mais il est riche et possède des objets de luxe tels qu’une voiture et un phonographe. Il essaie de convaincre Suzanne de partir avec lui en lui promettant des cadeaux, mais elle reste indifférente à ses avances. La famille de Suzanne le considère comme aveugle et incapable de comprendre leur misère, mais Monsieur Jo se sent lui-même malheureux et destiné à souffrir à l’idée que Suzanne n’est intéressée par lui que pour son argent.

Jean Agosti est l’ami de Joseph et de Suzanne. La mère de ces derniers lui demande de vendre le diamant au père Bart. Il finit par se rapprocher de Suzanne et tombe amoureux d’elle, mais il n’aura droit qu’à son corps étant donné que celle-ci lui refusera son cœur. À la fin de l’histoire, Suzanne part avec Joseph et sa nouvelle compagne, Lina, en laissant Agosti à la plaine.

Analyse de l’oeuvre

Une oeuvre que l’on peut qualifier d’épopée

Un barrage contre le Pacifique est un roman de Marguerite Duras qui a été publié en 1950. Il est influencé par le réalisme des romans américains de William Faulkner et d’Erskine Caldwell, ainsi que par l’existentialisme français. L’intrigue du roman est prenante et se déroule avec une grande intensité. Elle est constamment animée par la folie familiale, le désir de fuir et l’obsession de l’argent. Le roman est divisé en deux parties et se déroule sur quelques mois. La première partie se déroule sur presque deux mois et la deuxième partie se déroule sur une semaine. L’action se déroule à proximité d’un barrage sur le Pacifique, où vivent la mère et ses deux enfants, Suzanne et Joseph. La mère est décrite comme un “monstre dévastateur” qui a une emprise malsaine sur ses enfants et la nature, en particulier le Pacifique, est présentée comme une force puissante. Un barrage contre le Pacifique peut être qualifié de roman épique du fait qu’il présente des caractéristiques de l’épopée, telles que le grossissement des événements et des personnages et le grand rôle donné aux forces de la nature.

Dans Un barrage contre le Pacifique, Marguerite Duras dépeint des personnages dominés par le sentiment de leur malchance et de leur désespoir face à leur quotidien pauvre et difficile. Le roman dénonce l’injustice de la société coloniale et de son capitalisme sauvage, ainsi que la morale bourgeoise, en particulier en montrant une mère violente et vénéneuse. Le roman évoque également l’importance de l’émancipation des enfants et de leur initiation par l’amour et le cinéma. Cependant, le titre du roman, “Un barrage contre le Pacifique“, reflète surtout la révolte obstinée des personnages contre la nature, symbolisée par la mer, et leur impuissance face à elle. Le thème des enfants mourants souligne l’absurdité de la condition humaine.

Analyse littéraire

Le style de l’écriture de Marguerite Duras dans son livre Un barrage contre le Pacifique est souvent familier, avec l’utilisation de mots et d’expressions vulgaires. Parfois, on peut noter qu’il y a des répétitions et des maladresses dans l’écriture. On peut alors se demander si ces mots et ces expressions étaient utilisés de manière réaliste dans le contexte de l’Indochine française décrit dans le livre.
L’auteure a utilisé plusieurs techniques pour rendre son écriture expressive, tels que la répétition, l’emploi de mots recherchés, l’ellipse, les dialogues, la description visuelle, l’humour, le lyrisme anxieux, les envolées, les comparaisons et les métaphores. Elle a également créé un nouveau mot et a fait appel à des figures de style telles que l’hyperbole, l’oxymore et les accumulations frémissantes.

Exemple de description visuelle : “la ville s’éclaira pour devenir alors un chaos de surfaces brillantes et sombres […] le chaos chaque fois se défaisait autour de l’auto et se reformait derrière elle
Cette description utilise des mots tels que “chaos“, “brillantes” et “sombres” pour donner une image visuelle de la ville éclairée par les phares de l’auto, qui semble se déplacer à travers un paysage chaotique et changeant.

Exemple de l’emploi de mot recherché : “l’appareil immaculé de sa beauté” Ici, le mot “immaculé” est utilisé pour décrire la beauté de quelqu’un ou quelque chose de manière élégante et recherchée. Le mot “immaculé” signifie “qui n’a pas la moindre tache ou qui est d’une blancheur absolue” et donne une image de pureté et de perfection.

Exemple de l’humour : “On croit couver un petit aigle et il vous sort de dessous le bureau un serin“. Cette phrase utilise une comparaison humoristique entre un aigle, qui est un animal connu pour sa noblesse et sa puissance, et un serin, qui est un petit oiseau chanteur. L’idée est que l’on s’attend à ce qu’une chose ou une personne soit exceptionnelle ou remarquable, mais qu’elle se révèle finalement être tout à fait banale ou inattendue. Cette phrase est donc drôle car elle utilise une comparaison surprenante pour faire une plaisanterie sur les attentes et les surprises de la vie.

Exemple de lyricisme anxieux : “ankylosée jusqu’à l’âme” . Cette phrase utilise l’hyperbole, une figure de style qui consiste à exagérer ou à grossir les traits d’une chose ou d’une situation pour en souligner l’importance ou l’intensité. En parlant de quelqu’un qui est “ankylosée jusqu’à l’âme“, Duras suggère que cette personne est complètement paralysée, tant physiquement que mentalement, par une émotion ou une situation difficile. Cette phrase reflète donc un sentiment de désespoir ou d’angoisse intense.

Quant à M. Jo, du moment qu’il avait donné le phonographe, il inexistait d’autant“. Dans cette phrase, Duras a créé le mot “inexister” en combinant les mots “in-” et “exister“, qui signifient respectivement “non” et “exister” en français. Le mot “inexister” n’existe pas dans le dictionnaire, mais Duras l’a utilisé pour dire que M. Jo avait disparu ou n’existait plus depuis qu’il avait donné le phonographe. En utilisant ce mot, Duras a donné une idée originale et poétique de la manière dont M. Jo a perdu de l’importance ou de l’influence suite à son geste généreux.

Exemple d’accumulations frémissantes : “tant de films, tant de gens s’aimer, tant de départs, tant d’enlacements, tant d’embrassements définitifs, tant de solutions, tant de prédestinations, tant de délaissements cruels, certes, mais inévitables, fatals“. Dans cette phrase, Duras utilise une série de mots ou de phrases qui se répètent et s’accumulent pour créer un effet de frémissement ou d’excitation. En utilisant de nombreuses répétitions du mot “tant” et en variant les termes qui suivent, Duras donne une idée de l’abondance ou de la richesse des événements et des sentiments qu’elle décrit. Cette accumulation de mots et de phrases crée une atmosphère de passion et de mouvement qui reflète l’intensité des émotions des personnages.

A propos de l'auteur

Les Résumés

1 commentaire

  • Absolument fan depuis toujours des oeuvres de M. Duras, j’ai lu tous ses livres, vu tous ses films ou pièces de théâtre, j’ai recherché toutes les thèses faites à son propos, et lu tous les auteurs qu’elle a aimés. Sans omettre son mari Robert Antelme! Et Mascolo…

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