Littérature

Montesquieu, Les Lettres persanes : résumé, personnages et analyse

Page de couverture de notre fiche de lecture sur Les Lettres persanes de Montesquieu incluant résumé, présentation des protagonistes et analyse de l'oeuvre épistolaire.
Ecrit par Les Résumés

Résumé du roman Les Lettres persanes de Montesquieu

Lettres 1 à 23

De la lettre 1 jusqu’à la lettre 23 : ces lettres traitent du voyage qu’effectue Ispahan à Paris de mars 1711 jusqu’en mai 1712.

Lettres 1 à 10

Ces premières lettres introduisent les personnages et permettent d’asseoir le décor. Les lieux visités ainsi que les dates sont très précis et permettent de bien se repérer dans l’espace et le temps. Dans ces premières lettres, Usbek laisse transparaître une forme de misogynie dans ses échanges avec les femmes de son harem. Il avoue également à Rustan la jalousie qu’il ressent envers celles-ci ainsi que le mal qu’il a à les quitter. Ce dernier se confie, quant à lui, au sujet de l’incompréhension que son départ a généré. Cette décision n’est pas vue d’un très bon œil dans leur pays. Zachi et Fatime racontent leurs quotidiens à leur amant. Elles se plaignent de son absence et expliquent leur souhait de le voir revenir.

Lettres 11 à 14

Répondant à une lettre de Mizya, dans laquelle celle-ci se plaint de l’absence d’Usbek, ce dernier lui décrit les spécificités de la société des Troglodytes. Leur histoire est celle d’un peuple qui ignorait l’équité, qui fonctionnait sans gouvernement et qui en est mort. Par ces lettres, Usbek dresse le tableau d’une société ou l’intérêt particulier passe par l’intérêt commun. Les troglodytes confrontent les vertueux à ceux qui qui ne sont pas maîtres de leurs passions. Leur propre roi déplore sa sacralisation dans le fait d’être tenu à la bonté par son nouveau statut et non par sa propre vertu.

Lettres 15 à 23

Dans ces lettres, une autre facette d’Usbek est mise en avant, celle de sa soif de nouveauté tant pour ce qui est de la philosophie mais aussi de la politique. Le sultan, à la limite de la tyrannie qui transparaissait à travers les premières lettres, est petit à petit gommé au profit d’un personnage friand de découverte. Par son observation des mœurs de la ville qu’il visite, Paris, il découvre certains de ses charmes mais aussi les travers d’une société curieuse. Ce vent d’idées nouvelles auquel il fait face, le pousse à se questionner, entre autres, au sujet de l’objectivité des lois. Sa confrontation avec l’occident lui fait également prendre conscience de la faiblesse de l’empire Ottoman qui se fait dévorer par l’Europe.

Usbek réprimande Zachi après qu’il l’ait été vue aux côtés d’un eunuque blanc et menace ce dernier de lourdes conséquences en cas de futur écart. Il se questionne alors sur la condition féminine beaucoup plus libérée en occident et s’étonne des différences culturelles.

Lettres 24 à 91

Les lettres 24 à 91 font la chronique du règne de Louis XIV qui touche à sa fin. Ces écrits sont effectués entre juin 1712 et août 1715.

Lettres 24 à 46

Dans ces lettres, le côté machiste d’Usbek est révélé au grand jour. Le public de l’époque est heurté par sa conception du rôle féminin dans la société.

Sa découverte progressive des coutumes et mœurs françaises l’amène, peu à peu, vers une forme de sagesse. Dans ces lettres, tout est passé en revue par Usbek, Rica : la course quotidienne des français, l’influence et le pouvoir de manipulation du Pape et du Prince sur les esprits, l’extravagance des parisien intéressés par Usbek uniquement du fait qu’il soit persan, la consommation d’alcool comme moyen de fuir un quotidien morose et pleins d’autres spécificités de la vie parisienne.

Rica, parti étudier à Venise, raconte son appréciation pour cette ville. Il compare les différences des relations hommes/femmes en orient et en occident et avoue apprécier l’Europe. Il raconte également une de ses aventures avec un homme qui voulait changer la matière en or.

Au cours de ces lettres, Usbek rend grâce à un servant nommé Pharan qu’il met en garde quant à sa bonne conduite. Usbek confie à Nessir que sa santé se dégrade. Il ne veut toutefois pas que cela se sache dans le sérail.

Lettres 47 à 68

Ces lettres dénoncent les mensonges sociaux qui régissent les mœurs occidentales. D’autre part, Usbek a beaucoup de mal à gérer à distance les conflits d’intérêts qui tourmentent sa patrie.

Lettres 69 à 91

Usbek se questionne énormément à propos de l’Islam. Les guerres de religions sont-elles révélatrices des dangers et de la violence du fanatisme ?

Lettres 92 à 146

Les lettres 92 à 146 font la chronique de la régence française après la mort de Louis XIV de septembre 1715 à novembre 1720.

Lettres de 92 à 111

La perte de puissance du pouvoir royal et des parlements qui suit la mort de Louis XIV pousse Usbek à se questionner au sujet de la fragilité des monarchies. Le système constitutionnel anglais lui semble alors plus solide en comparaison au modèle royal ou les pleins-pouvoirs sont octroyés à une seule personne. Même s’il parvient à cette réflexion concernant l’occident, il continue toutefois d’appliquer un absolutisme sur le sérail. Son évolution philosophique reste fortement empreinte de la culture qui l’a vu grandir.

Lettres 112 à 132

Les nombreuses épidémies et la famine ont secoué le XVIIème siècle. Cette dépopulation massive pousse Usbek à se questionner au sujet d’autres causes telles que le célibat des prêtres ou encore l’interdiction du divorce chez les catholiques. Usbek, se révolte contre l’esclavage et la colonisation qui occasionnent la déperdition humaine. Encore une fois, sa réflexion ne le pousse pas à l’introspection. Il ne remet pas en question le pouvoir qu’il exerce sur les femmes de son harem ou encore le despotisme dont il fait preuve à l’égard des eunuques.

Lettres de 133 à 146

Ces lettres sont en grande partie de Rica. Les découvertes qu’il fait à la bibliothèque l’amène à remettre en question une grande partie de son idéologie. Celle traitant d’un sérail à l’envers pousse Usbek à réfléchir au sujet des conditions de vie des femmes de son harem. La correspondance entre les deux hommes continue d’aborder un ensemble de thèmes politiques et sociaux, tels que la conséquence de l’impôt sur le peuple ou encore les répercussions que peut avoir un mauvais ministre lorsqu’il donne le mauvais exemple à son peuple.

Lettres 147 à 161

Les lettres de 147 à 161 traitent du désordre qui a lieu au sérail entre septembre 1717 et mai 1720

Usbek, informé par les eunuques des désordres qui ont lieu au sérail, fait preuve d’incohérence et d’irrationalité en proférant de sévères menaces à l’encontre des responsables. Les personnages féminins évoluent alors très rapidement. Le récit prend fin avec la même couleur qui lui est propre au début de l’intrigue, toutefois étoffée de tragédie.

Roxane, la favorite d’Usbek, pour laquelle il loue un amour fou, se suicide en informant son époux au préalable, au moyen d’une lettre. Cette fin souligne alors la tragique répercussion de l’obscurantisme d’Usbek. Son incapacité à dépasser les coutumes et mœurs de sa culture d’origine, malgré les nombreux enseignements dont il a bénéficiés, au contact d’une société complètement différente de la sienne, semble être puni par le récit. La révolte ultime dont fait preuve Roxane clôt ainsi l’œuvre de Montesquieu.

Présentation des personnages

Usbek : Il est l’un des deux personnages principaux. Haut-dignitaire de la cour d’Ispahan, son voyage est, avant tout, une fuite afin d’échapper à la mort qui accompagnerait forcément sa disgrâce. Il est en quête de sagesse et d’équilibre politique. Il remet souvent en question les valeurs de la civilisation dont il est issu et recherche des valeurs universelles. Usbek reste toutefois profondément oriental dans sa façon de traiter les femmes. Il est tantôt le porte-parole de l’auteur et tantôt l’exemple à ne pas suivre. La dualité de ce personnage contradictoire fait de lui un sujet particulièrement intéressant à suivre au cours du récit. Il occupe un rôle central dans l’œuvre de Montesquieu. Il permet au romancier de traiter le thème du despote éclairé de façon très philosophique.

Rica : Plus jeune que son ami, il reste très attaché à sa patrie. Moins intellectuel que l’est Usbek, Rica critique la société occidentale auquel il est confronté mais de manière plus observatrice et moins philosophique. Avec le temps, son étonnement s’amoindrit et il s’assimile très bien en occident, au point d’être critiqué pour avoir oublié sa terre natale, la Perse.

Nassir, Rustan et Mirza : Ils sont tous trois restés à Ispahan.

Ibben : Se trouve à Smyrne.

Rhédi : Neveu d’Usbek, il est à Venise. Il y est venu chercher la compréhension et la sagesse.

Nargum : Il est ambassadeur à Moscou.

Les eunuques : Plus symboliques que réels, ces personnages servent surtout d’instrument de despotisme à Usbek. Sorte d’espions de ce despote lui permettant de garder la main mise sur son harem, ils sont doublement des victimes. Devant la perte de leur virilité, ils sont ensuite réduits en esclavage aux services des femmes qui composent le harem.

Les femmes du harem : Fatmé, Zachi, Zélis et Roxane, entre autres, composent le harem d’Usbek. Asservies depuis leur plus jeune âge, l’auteur use de son œuvre afin d’amener une réflexion humaniste sur le sujet.

Analyse de l’œuvre

Les Lettres persanes est un roman épistolaire écrit par Montesquieu. Il a été publié pour la première fois en 1721, à Amsterdam, sans que le nom de l’auteur y figure. Ce roman fictif est composé de la correspondance échangée entre Usbek et Rica, deux voyageurs persans.

Le succès de ce roman a suscité un intérêt pour cette forme de roman au cours du siècle des lumières. En effet, la forme épistolaire a permis à l’auteur, membre de l’académie des sciences de Bordeaux à l’époque, d’aborder de multiples sujets tels que la religion, la politique ou encore la philosophie.

Cet auteur français écrit la correspondance fictive que s’échangent Usbek et Rica entre eux, mais aussi avec leurs amis restés en Iran, au cours de leur périple en Europe. Ces lettres vont être l’occasion d’échanger leurs pensées ainsi que leurs critiques des mœurs occidentales, particulièrement à propos de la religion est du système monarchique en place (l’histoire se déroule au cours de la régence qui a suivi le décès de Louis XIV). Ces thèmes sont, alors, précurseurs de ceux abordés par les philosophes des lumières.

L’auteur effectue une comparaison de la condition féminine en Orient et en Occident. Les deux personnages principaux ayant un rapport aux femmes très différents, Montesquieu profite de ce roman pour aborder ce sujet. Alors que son œuvre débute sur de la satire, celle-ci se clôture par le suicide de Roxane, favorite du harem d’Usbek, faisant ainsi passer l’œuvre dans le tragique.
Un des autres thèmes majeurs de l’œuvre est évidemment le voyage. Le sujet de l’orientalisme abordé dans Les Lettres persanes été très en vogue au XVIIIème siècle, ce qui a sans doute participé au succès de l’œuvre. L’intérêt pour les voyages et pour l’orientalisme a été perçu comme un moyen de lutter contre l’ignorance. Cet intérêt grandissant correspond également à la montée en ampleur du mouvement des Lumières au sein duquel cette idée est très répandue.

Avec l’orientalisme, Montesquieu met d’autant plus en valeur sa critique du système politique en place. Par la satire, l’auteur démontre que dans un système monarchique, où les pleins pouvoirs sont possédés par un roi, le peuple est maintenu dans la soumission et l’ignorance. Même si l’auteur ne s’en prend pas toutefois à la monarchie elle-même, mais plutôt au pouvoir que s’octroient les monarques sur leurs peuples au nom d’une volonté divine.

Montesquieu, en accord avec la philosophie des Lumières et leur rejet de la puissance accordé à l’Eglise, fait dans ce roman une critique de la religion en place à cette époque en Europe, à savoir le christianisme. L’auteur opère sa critique en se dissimulant derrière les mots de deux voyageurs de confession musulmane qui découvrent les préceptes de la chrétienté. Par la correspondance d’Usbek et Rica, il démontre les préceptes jugés irrationnels par ces deux amis issus d’une toute autre culture et bercés par une toute autre doctrine.

Avec toutes les thématiques abordées dans cette correspondance, Montesquieu trace les grandes lignes de la philosophie qui va être celle des grands penseurs du siècle des Lumière. Convaincu du fait que l’homme est capable de faire preuve de raison et que l’évolution et le progrès peuvent être réalisés par l’humanité, ces philosophes vont questionner le système politique et religieux en place. Par leurs œuvres, ces penseurs vont tenter de faire barrière à l’obscurantisme par la diffusion du savoir. Les Lettres persanes, comme beaucoup d’autres œuvres du XVIIIème siècle, est fortement imprégnée de la philosophie des Lumières.

Toujours en se dissimulant derrière les traits de ses personnages, Montesquieu opère également une critique de la société de l’époque. Ces deux héros, lorsqu’ils arrivent à Paris, sont confrontés à une société, à des mœurs et des pratiques bien différents de ceux dont ils sont issus. L’auteur profite alors de cette occasion pour opérer une critique satirique de faux-semblants et de l’obnubilation des apparences qui dominent la société de l’époque.

Plusieurs tableaux sont alors passés en revus par le romancier : le courtisan, le magistrat, le casuiste ou encore les femmes. Montesquieu dresse une image très théâtrale de la société. Celle-ci, dans ses pratiques sociales, est décrite par l’auteur comme étant en représentation permanente à l’opéra, dans les salons ou encore par le biais de la mode.

En plus des nombreux thèmes qu’il aborde, le roman traité se démarque par sa forme épistolaire. Composé de 161 lettres, Les Lettres persanes sont très variées pour ce qui est des sujets abordés, mais elles se démarquent aussi par leurs tons et leurs styles multiples. L’auteur tend, toutefois, vers la satire. Dans ses Lettres persanes, Montesquieu est précis et incisif. Il grossit le trait de l’ironie et manie, avec grande précision, l’art du raccourci. Non sans rappeler la galerie des caractères de la Bruyère, les portraits dépeints dans Les Lettres persanes sont caustiques. Par le rire, l’auteur défait le lecteur de ses préjugés et l’amène à se questionner à propos des différents thèmes abordés.

Ce roman majeur de la littérature française doit également son succès à l’emploi du regard éloigné. À travers le point de vue des deux amis persans, la société de l’époque est analysée par un regard neuf. Le regard éloigné procure alors, à l’œuvre, un caractère romanesque et dramatique. Il occupe dans un premier temps une fonction satirique. Les deux persans, en décrivant soi-disant objectivement la société française, s’attardent sur des détails qui ironisent et ridiculisent certaines mœurs européennes. Le regard éloigné se veut également libre et détaché des idées préconçues qui emprisonnent la société française. Celui-ci occupe dès lors une fonction philosophique. Il devient outil de relativisme, moyen d’inculquer des préceptes de tolérance. Les coutumes et les valeurs changent selon les époques et les lieux, le regard éloigné permet d’asseoir l’idée selon laquelle il n’est pas bon de les hiérarchiser. Cet objectif est encore une fois en lien avec la philosophie des Lumières qui a comme objectif d’aboutir à une société cosmopolitique, qui serait soudée par des valeurs de paix et d’universalité.

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