Littérature

Prosper Mérimée, Tamango : résumé, personnages et analyse

Ecrit par Les Résumés

Parue le 4 octobre 1829 dans La Revue de Paris, Tamango est une nouvelle écrite par Prosper Mérimée afin de critiquer l’absurdité de l’esclavage et la supériorité présumée de la civilisation européenne. Découvrons ensemble cette œuvre historique qui dénonce la déshumanisation des esclaves.

Résumé détaillé de Tamango de Prosper Mérimée

Le Capitaine Ledoux, un esclavagiste au coeur noir

Le capitaine Ledoux s’est distingué lors de la bataille de Trafalgar en dépit d’une blessure grave. Suite à une brève retraite, il a rejoint un corsaire en qualité de second lieutenant, et a amassé une fortune grâce à ses prises. Devenu capitaine d’un corsaire, ses exploits contre les caboteurs de Jersey sont demeurés célèbres. Après la guerre, il a proposé ses services à des commerçants pacifiques et a su gagner leur confiance. Avec l’interdiction de la traite des esclaves, sa capacité à déjouer les douanes françaises et les croiseurs anglais le rende précieux pour les marchands d’ébène.

Ledoux a construit un navire appelé L’Espérance, spécialement conçu pour transporter un grand nombre d’esclaves avec un confort minimal. Il a conçu un agencement où les esclaves s’assoient parallèlement tandis que d’autres se couchent perpendiculairement. Cela permet de transporter plus d’esclaves. Malgré ses mesures draconiennes, Ledoux prétend traiter les esclaves avec humanité. La traversée vers l’Afrique s’est déroulée sans incident, arrivant opportunément alors que Tamango, un célèbre guerrier et trafiquant d’esclaves, avait une grande quantité d’esclaves à vendre à bon prix.

Négociation avec Tamango, un marchand d’esclave

Le capitaine Ledoux rend visite à Tamango avec lequel il entame des négociations houleuses et alcoolisées. Ils s’accordent sur l’échange de 160 esclaves contre divers objets et de l’alcool. Les esclaves sont remis aux Français qui les enchaînent avec des fers, montrant la soi-disant supériorité de la civilisation européenne. Tamango, restant avec quelques esclaves invendus, devient violent et réclame à Ledoux d’en acheter d’autres sous peine de les tuer. Ledoux refuse et il tue une esclave. Il met en joue un vieillard, mais une de ses femmes s’y oppose. Elle reconnaît le magicien qui lui a prédit qu’elle serait reine. Tamango la frappe et la donne en cadeau à Ledoux qui accepte avec plaisir. Ledoux et son équipage partent rapidement pour éviter d’être repérés par les croiseurs, laissant Tamango, ivre, endormi sur l’herbe.

Après une nuit de débauche, Tamango se réveille pour découvrir qu’il a offert sa femme Ayché en cadeau au capitaine blanc du navire. Désespéré de la retrouver, il tente de rejoindre le navire, mais est capturé et maîtrisé. Malgré sa résistance héroïque, il est attaché et jeté dans la cale du navire avec les autres esclaves. Le navire s’éloigne de l’Afrique et le capitaine traite les esclaves comme des marchandises, leur accordant de brefs moments sur le pont pour respirer et se divertir, tout en maintenant un contrôle strict.

Un complot se profile à l’horizon

Tamango apparaît sur le pont et observe tristement l’immensité de l’eau qui entoure le navire. Il ignore ses chaînes inconfortables et, en voyant Ayché servir le capitaine, évoque Mama-Jumbo, une figure terrifiante utilisée pour menacer les femmes infidèles. L’interprète explique que Mama-Jumbo est en réalité un farceur déguisé en drap blanc portant une citrouille sculptée pour tête. Ledoux révèle que sa femme a peur de Martin-Bâton. Il tente de consoler Ayché. Malgré ses efforts pour apaiser sa détresse, Ayché demeure inconsolable, ce qui irrite le capitaine qui réprimande l’officier de quart pour une manœuvre en cours.

Pendant la nuit, l’équipage entend des chants et des cris provenant de l’entrepont du navire. Le capitaine intervient violemment et interdit à Ayché de parler à Tamango. Ce dernier, en encourageant les autres esclaves à se rebeller et à retrouver leur liberté, utilise un dialecte que l’interprète ne peut pas comprendre. Tamango use d’arguments convaincants et fait référence à ses connaissances occultes pour susciter la crainte. Il teste également la vigilance des gardes et apprend à manipuler discrètement les armes.

Tamango reçoit un biscuit contenant une lime dissimulée, symbole du succès de leur complot pour la liberté. Il fait semblant de communiquer secrètement avec un esprit invisible, semant la peur parmi les esclaves. Tamango dévoile la lime, expliquant qu’un esprit invisible la lui a donnée, et convainc ses compagnons de se joindre à la rébellion. Ils prévoient de saisir des armes et d’attaquer leurs oppresseurs, même si certains esclaves ne peuvent pas participer pleinement. Trois esclaves robustes ont pour mission de tuer l’homme portant la clé des chaînes et de libérer leurs camarades captifs.

La mutinerie

Le capitaine Ledoux est de bonne humeur et annonce une gratification à l’équipage à leur arrivée à la Martinique. Cependant, un groupe d’esclaves parvient à se libérer et attaque l’équipage européen. Ledoux tente de tuer le chef de la révolte, Tamango, mais échoue et est lui-même tué. Les révoltés massacrent sans pitié le reste de l’équipage. Après cette rébellion réussie à bord du navire, Tamango et les autres esclaves prennent le contrôle. Cependant, Tamango provoque involontairement un accident qui endommage le navire. Les esclaves se méfient de lui et le tiennent pour responsable de leurs malheurs. Tamango se retire dans les habitations du capitaine et s’y enferme avec sa femme.

Il faut trouver une solution !

La situation à bord du navire devient désespérée. Lorsqu’un des esclaves découvre de l’eau-de-vie, ils se saoulent et deviennent insouciants. Après une nuit de débauche, ils se réveillent pour constater que de nombreux blessés sont morts. Leur désespoir grandit alors qu’ils tentent tout pour se sortir de cette situation. Tamango refuse de les aider. Ils continuent à boire pour échapper à leur triste réalité. Le cycle de détresse et d’ivresse se répète pendant plusieurs jours, entraînant la mort de certains et des tentatives de suicide chez d’autres.

Tamango sort de son silence et leur annonce qu’il a eu une vision de liberté et propose de les ramener dans leur pays. Malgré l’absurdité de son plan, certains Noirs y croient et décident de partir à bord d’embarcations légères. L’embarquement est difficile et seuls une chaloupe et un canot sont opérationnels, laissant de nombreux blessés et malades derrière. La chaloupe, surchargée, coule rapidement, ne laissant qu’une douzaine de survivants, dont Tamango et Ayché. Le canot les abandonne et leur sort ultérieur reste inconnu.

La nouvelle vie de Tamango

Il ne reste plus que Tamango et Ayché sur le navire. La faim se fait de plus en plus pressante et la lutte pour la nourriture s’intensifie. Ayché succombe avant qu’une frégate anglaise n’arrive au navire. Tamango est secouru et raconte son histoire. Les planteurs désirent l’exécuter, mais le gouverneur lui accorde la “liberté”. Tamango travaille d’abord pour le gouvernement avant de devenir cymbalier pour le régiment du colonel du 75e. Tamango meurt plus tard à l’hôpital des suites d’une inflammation de la poitrine.

Présentation des personnages

Le capitaine Ledoux, un ancien matelot devenu amputé puis capitaine, est connu pour son rôle actif dans la traite négrière à bord de son navire, “L’Espérance”. Expert maritime et commerçant avisé, il optimise l’espace de son navire et voyage fréquemment pour acheter et vendre des esclaves. Son objectif est de gagner suffisamment pour mettre fin à ses voyages. Malgré sa ténacité face à Tamango, il finit par faire de ce dernier son esclave, espérant en tirer une grande fortune. Cependant, la révolte menée par Tamango lui sera fatale. Ledoux est un homme opportuniste et peu scrupuleux qui méprise totalement les Noirs, ne les voyant que comme un moyen de gagner de l’argent. Il n’éprouve aucune compassion pour eux.

Tamango est un guerrier africain qui vend son propre peuple principalement pour obtenir de l’alcool. Ce marchand d’esclaves est un homme impitoyable qui a choisi cette voie suite à une série de mauvais choix. Pris de remords après avoir vendu sa propre femme, il tente de la récupérer, mais se retrouve emprisonné et destiné à être vendu comme esclave. Il est l’instigateur de la mutinerie sur le navire, qui se termine tragiquement. Seul survivant, il est sauvé et a l’occasion de se réhabiliter auprès du gouvernement anglais, mais finit par succomber à une maladie liée à son alcoolisme. Son penchant pour la boisson l’entraîne à faire des choix regrettables, ce qui le force par la suite à réparer ses erreurs. D’un autre côté, Tamango est un homme astucieux qui parvient à ses fins en jouant sur la croyance de sa femme en Mama-Jumbo ou sur les esprits avec lesquels il prétend communiquer. En effet, il fait croire aux esclaves que la lime qu’il a reçue lui vient du diable. C’est un homme intelligent qui sait jouer sur la crédibilité des gens.

L’interprète est un matelot blanc qui, connaissant la langue africaine, sert d’intermédiaire entre Tamango et le capitaine Ledoux. Contrairement à ce dernier, l’interprète fait preuve de compassion pour la condition des esclaves. Il démontre son humanité en payant pour la libération des esclaves invendus et en prenant soin de Tamango. Cependant, sa bonté et sa sympathie envers les esclaves ne lui sont d’aucun secours lors de la mutinerie, car en tant que blanc, il est tué lors de la rébellion orchestrée par Tamango.

Ayché est l’une des femmes de Tamango. Elle s’oppose à lui lorsqu’il menace un vieillard. En effet, cet homme est un magicien qui a prédit à Ayché qu’elle serait reine. En un sens, il n’avait pas tout à fait tort, car elle se rapproche de Ledoux, qui exerce une certaine domination sur le bateau. D’autre part, lorsque Tamango orchestre sa rébellion, il devient le seul maître à bord. On peut donc supposer qu’elle a été une “reine” d’une certaine façon, même si cela a été de courte durée.

Analyse de l’oeuvre

Tamango, un héros complexe face à la brutalité de l’esclavage

Dans sa nouvelle Tamango, Mérimée illustre la traversée d’un navire d’esclaves et donne vie à un ensemble de personnages restreint, au cœur duquel se trouve la figure emblématique de Tamango. Ce dernier incarne diverses facettes tout au long de cette nouvelle. Dès le début de l’œuvre, il est présenté comme une figure de déshonneur, prêt à troquer les membres de sa propre communauté pour savourer quelques privilèges temporaires. À mesure que l’intrigue se déroule, nous découvrons sa vulnérabilité, sa faiblesse dominante pour l’alcool, qui le conduit à renoncer à son épouse et à la confier à Ledoux. Cependant, malgré ses défauts, Tamango s’érige en héros, prenant l’initiative d’un plan audacieux au sein du navire de Ledoux. C’est lui qui orchestre la mutinerie sur le bateau.

Profondément ancré dans le réalisme, le récit met en exergue la traite négrière et les ravages qui en découlent, en soulignant l’ignorance effrayante et la peur qu’éprouvent les Africains face à l’intransigeance des marchands d’esclaves, incarnée par le capitaine Ledoux. Les moments clé du récit, y compris la marchandisation des esclaves noirs, la révolte brutale à bord du navire, et la fin inattendue de Tamango, emporté par son addiction à l’alcool, confèrent à cette nouvelle une tension narrative et un impact mémorable.

La dénonciation de l’esclavage dans Tamango

Il est particulièrement frappant de constater à quel point l’homme noir est dépeint comme étant en infériorité intellectuelle face à l’homme blanc. Bien que Tamango démontre son intelligence et son sens de l’observation pour déterminer les actions à entreprendre, il n’est mis en valeur qu’en tant que guerrier. Un rôle dans lequel il s’inscrit naturellement, ayant été un guerrier avant de devenir un marchand d’esclaves. Néanmoins, une fois que tous les Blancs ont été éliminés, Tamango se retrouve dépourvu d’idées pour sauver son peuple. Pire encore, la seule idée qui émerge est fatalement erronée. En effet, en décidant de charger la chaloupe de la manière dont il le fait, il se condamne lui-même ainsi que tous ceux qui l’ont suivi.

L’auteur français dénonce avec un certain sarcasme la prétendue supériorité de la civilisation européenne, notamment à travers l’esclavage des Noirs. Il souligne la déshumanisation systématique des esclaves lors de leur voyage transatlantique, mettant en évidence l’indifférence effroyable face aux pertes humaines. Tout en condamnant sans équivoque l’esclavage, Mérimée exprime une certaine empathie envers les esclaves, en particulier Tamango, qu’il qualifie de “héros“. De plus, son choix délibéré d’omettre les détails des tortures infligées par la faim, pour ne pas “fatiguer” le lecteur, peut être interprété comme un signe de respect pour les souffrances vécues par les esclaves.

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