Une nuit de Cléopâtre est une nouvelle historique de Théophile Gautier, un auteur français du 19e siècle. Elle a été publiée du 29 novembre au 6 décembre 1838 dans La Presse sous forme de feuilletons.
Résumé chapitre par chapitre de Une nuit de Cléopâtre de Théophile Gautier
Chapitre 1
L’histoire commence par la description d’une cange, un petit bateau à voile, rapide et léger, utilisé pour voyager sur le Nil ainsi que les différents paysages qu’elle rencontre. Très vite, nous plongeons au cœur de cette cange aux cinquante rameurs.
Dans une des pièces du bateau se trouve Cléopâtre qui retourne dans son palais d’été, en costume égyptien, après avoir assistée à une panégyrie. Elle est accompagnée de Charmion, son esclave grecque favori. L’auteur s’attache à décrire intégralement le costume de Cléopâtre pour le plus grand bonheur de ses lectrices : “La reine Cléopâtre avait pour coiffure une espèce de casque d’or très léger formé par le corps et les ailes de l’épervier sacré ; […] une robe de lin à côtes diagonales […] le bras serré par six cercles d’or et la main ornée d’une bague représentant un scarabée.[…] la reine Cléopâtre portait de légères sandales fort minces”.
Seule avec Charmion, la reine Cléopâtre se plaint de la chaleur avant de lui confier qu’elle s’ennuie.
Chapitre 2
Conscient que sa maîtresse compte lui faire une confidence, Charmion se penche vers elle. Elle lui avoue qu’elle est effrayée par cette Egypte sur laquelle elle gouverne. Un pays qui cuit sous un soleil de plomb et qui ne rencontre que trop rarement la pluie. Un pays qui adopte des mœurs qui lui sont de plus en plus bizarres : vénérer des chimères, momifier les morts. Cette pensée lui vient juste après avoir assisté à une panégyrie, une grande fête religieuse dans laquelle le peuple grec se rassemblait dans un sanctuaire afin d’honorer les dieux. Par ailleurs, elle lui révèle qu’elle pourrait surmonter tout ça si elle était aimée, mais ce n’est pas le cas. Ce qui la rend encore plus triste. Charmion lui rappelle que c’est une reine et celle-ci lui fait comprendre que son grand souci vient de là. Elle ne peut pas se mélanger à ses semblables. Elle voudrait tellement vivre une aventure, un petit quelque chose, mais aujourd’hui, elle s’ennuie. Charmion ironise la situation en annonçant “On voit bien […] que la reine n’a pas eu d’amant et n’a fait tuer personne depuis un mois.”
Fatiguée de sa longue tirade, Cléopâtre se couche sur son lit et s’endort pendant que Charmion lui caresse les pieds avec une plume.
Non loin de là, un homme d’une vingtaine d’années navigue seul sur le Nil dans une nacelle. La cange et la nacelle arrivent au débarcadère du palais d’été de Cléopâtre.
Chapitre 3
Ce chapitre nous permet d’en apprendre plus sur cet homme d’une vingtaine d’années, c’est Meïamoun, le fils de Mandouschopsch. C’est un beau garçon qui ne vit que pour les aventures périlleuses pour le plus grand malheur des femmes. Cet homme chaste est pourtant convoité par une des plus belles femmes de sa région, Nephté, la fille du prêtre Afomouthis, dont la beauté n’est surpassée que par Cléopâtre. Toutefois, Meïamoun ne voit pas la beauté de Nephté, car il est amoureux de la reine d’Egypte. S’il se retrouve là, c’est parce qu’il a également participé à la panégyrie pour voir la femme qu’il aime. Il maudit sa condition d’homme infortuné qui fait qu’il ne pourra jamais compter sur un amour réciproque. Il en veut à la déesse Hâtor de le tourmenter autant avec cet amour impossible.
De son côté, Cléopâtre prie également la déesse Hâtor lui demandant un plaisir nouveau, une sensation inconnue. À la différence de Meïamoun, elle reçoit pour réponse un rouleau de papyrus délivré par une flèche sur lequel est écrit “Je vous aime !”.
Chapitre 4
En regardant par la fenêtre, Cléopâtre aperçoit un homme qui nage et qui disparaît de sa vue. Si Meïamoun s’était retourné, il aurait pu voir que Cléopâtre le regardait du haut de sa fenêtre. En voyant le jeune homme disparaître, Cléopâtre demande à son chef des rameurs, Phrehipephbour, qu’il se charge d’envoyer deux barques pour le retrouver. Celui-ci revient sans le jeune homme, ce qui provoque la colère de Cléopâtre qui est habituée à obtenir immédiatement tous ses désirs. Charmion prend la défense du malheureux. Cléopâtre se demande quel homme aurait pu lui envoyer ce présent. Elle cite plusieurs hommes (Amoun-Ra, Chéapsiro, Sextus) mais Charmion lui explique que, bien que ces hommes la flattent, ils ne sont pas amoureux d’elle. Le mystère reste entier.
Parallèlement, on apprend que Meïamoun, à la vue de Phrehipephbour et de ses deux barques, est allé se cacher. S’il regrette de ne pas avoir signé le message de son nom, il se rassure en disant que son identité n’aurait rien apporté à Cléopâtre. Il ne sait pas à cet instant que sa bien-aimée pense à lui sans savoir qui il est. Meïamoun regagne le Nil à la nage pour rejoindre le canal qui mène aux bains de Cléopâtre.
Chapitre 5
Après une nuit pleine de songes où de multiples amants lui font de nombreuses déclarations, Cléopâtre se réveille. Elle part rejoindre ses bains avec toute sa suite, dont Charmion. Au moment où son corps dévêtu de sa tunique goûte l’eau, elle aperçoit la lueur ardente d’une prunelle jaune à travers les feuillages. La lance aux poings, les eunnuques débusquent Meïamoun qui s’était caché pour admirer sa bien-aimée. En lui demandant ce qu’il fait là, Meïamoun lui déclare qu’il est amoureux d’elle. Cléopâtre met enfin un visage sur le message qui lui a été destiné la veille. Après s’être gonflé d’orgueil en rabaissant cet homme, et se prétendant clémente, elle lui accorde son plus grand souhait, celui de l’aimer le temps d’une nuit. Main dans la main, ils retournent au palais.
Chapitre 6
Pour éblouir Meïamoun, Cléopâtre lui prépare une orgie suprême. Au cours du repas, la reine d’Egypte place son prétendant à ses côtés, le banquet offre des mets succulents aux plats innombrables et diversifiés. Après avoir mangé, les danseuses prennent place puis ces dernières laissent la place à Cléopâtre qui se met à danser pour Meïamoun. L’orgie dure toute la nuit et lorsque celle-ci commence à laisser doucement sa place au jour, Meïamoun saisit une coupe renfermant un liquide empoisonné. En voyant son prétendant qui souhaite mourir, car il sait qu’il ne pourra pas vivre sans l’amour de Cléopâtre, cette dernière hésite à ce qu’il embrasse la mort, souhaitant qu’il vive pour qu’il aime encore et encore. C’est à ce moment que des officiers de Marc-Antoine entrent dans la salle. Meïamoun se dit que c’est le moment opportun pour mourir, il boit le poison et meurt. Peu de temps après, Marc-Antoine arrive dans le palais et regrette de ne pas être arrivé à temps pour profiter du banquet. En voyant le cadavre sur la tête, il demande des explications à Cléopâtre qui lui répond : “ Oh ! rien […] c’est un poison que j’essayais pour m’en servir si Auguste me faisait prisonnière…”, puis comme si rien ne s’était passé, elle invite Marc-Antoine de se placer à côté d’elle pour regarder danser les “bouffons grecs”.
Présentation des personnages
Cléopâtre est la reine d’Egypte à la chevelure aussi noire que ses yeux. C’est une femme qui obtient tout ce qu’elle veut immédiatement. En revenant d’Egypte après avoir assisté à la panégyrie, elle confie à Charmion, son esclave favori, qu’elle s’ennuie. Elle souhaite une aventure pour trouver du réconfort dans cette Egypte qui l’effraie et qui la rend morose. Cette femme orgueilleuse, ne laisse pas transparaître sa joie lorsque Meïamoun lui confie son amour pour elle. Cléopâtre passe d’un amant à un autre rapidement comme le souligne Charmion dès le deuxième chapitre “On voit bien […] que la reine n’a pas eu d’amant […] depuis un mois.”. Après s’être délectée de Meïamoun, elle retourne profiter de Marc-Antoine comme si rien ne s’était passé.
Meïamoun est le fils de Mandouschopsch. Ce jeune homme d’une vingtaine d’années ne vit que pour les aventures périlleuses où il chasse les hyènes et les lions. Sa beauté attire de nombreuses femmes qu’ils répudient une à une (Nephté, la fille du prêtre Afomoutis, Lamia, l’hétaïre d’Athènes, Flora, la courtisane romaine). Meïamoun regrette sa condition d’homme infortuné qui fait qu’il est inconnu pour la femme dont il est éperdument amoureux : Cléopâtre la reine d’Egypte. Il tente le tout pour le tout en lui délivrant un message. Après avoir été pris à l’épier dans son bain, Cléopâtre lui accorde une nuit d’orgie. Sachant qu’il n’aura droit d’être aimé par elle que durant cette seule nuit, Meïamoun accepte de mourir dès le lendemain. Il boit la coupe renfermant le liquide empoisonné et épouse la mort.
Charmion est l’esclave grec favori de Cléopâtre. Cette dernière se confie à elle. Charmion assure le bien-être de sa maîtresse.
Phrehipephbour est le chef des rameurs. Il évite de justesse le courroux de Cléopâtre lorsqu’il revient bredouille après avoir recherché l’homme qu’elle avait aperçu du haut de sa fenêtre.
Marc-Antoine est l’amant officiel de Cléopâtre. Il n’arrive qu’à la fin et permet à Cléopâtre de rejeter son “jouet”, représenté en la personne de Meïamoun, qui a comblé son ennui le temps d’une nuit.
Analyse de l’œuvre
Dans Une nuit de Cléopâtre, Théophile Gautier nous plonge dans une nouvelle au genre romantique assez sombre. L’auteur nous parle d’un amour impossible, entre un illustre inconnu, Meïamoun qui n’a pour lui que le luxe de l’aventure et la beauté de la jeunesse. Cet amour à sens unique est clairement exprimé lorsque Meïamoun compare cet amour qu’il a pour la reine, à l’amour que pourrait ressentir un homme pour une étoile “C’est une étrange situation que d’aimer une reine ; c’est comme si l’on aimait une étoile”. Une situation dramatique qui apporte encore plus de mélancolie dans les lignes qui suivent : “encore l’étoile vient-elle chaque nuit briller à sa place dans le ciel ; c’est une espèce de rendez-vous mystérieux : vous la retrouvez, vous la voyez, elle ne s’offense pas de vos regards !”.
Dans son œuvre, Théophile Gautier prémédite la tournure des événements de façon implicite en désignant Morphée comme “le frère de la mort”. Et c’est exactement ce qu’il se passe dans Une nuit de Cléopâtre, l’amour tant rêvé, tant désiré par Meïamoun l’entraîne dans la mort. Aussi furtif qu’est cet amour, qui ne dure qu’une seule nuit, il est ironique de se dire que l’auteur a choisi l’étoile pour comparaison. En effet, dans cette courte nouvelle, l’étoile filante aurait été plus appropriée, cet astre volant qui ne vit qu’un court instant avant de s’éteindre à tout jamais, comme cet amour “partagé” entre Meïamoun et Cléopâtre. Si nous mettons le mot partagé entre guillemets, c’est que cet amour partagé n’est qu’une illusion. En effet, si Meïamoun est comblé par cette nuit d’orgie que lui offre la reine d’Egypte, cette dernière se sert de ce prétendant. Elle se nourrit de son amour pour goûter à ce qu’elle désire tant sur le moment : “un plaisir nouveau, une sensation inconnue”. Puis, lorsque Marc-Antoine arrive au palais, elle rejette ce pauvre Meïamoun qui n’a été pour elle qu’un simple divertissement pour combler son ennui.