Bonjour à tous ! C'est Monsieur Miguet, votre guide dans le monde fascinant de la littérature classique. Aujourd'hui, nous explorons une tragédie emblématique avec ce résumé sur Phèdre, écrite par Jean Racine en 1677.
Cette pièce raconte l'histoire de Phèdre, épouse de Thésée, qui est consumée par un amour interdit pour son beau-fils, Hippolyte. À travers des passions dévorantes et des conflits moraux, Racine explore les thèmes de l'amour, de la culpabilité et du destin.
Préparez-vous à être captivé par cette tragédie intemporelle qui nous montre les ravages de la passion et les conséquences des actes humains. Alors, prêts à découvrir le destin tragique de Phèdre et d'Hippolyte ?
"Phèdre" est souvent considérée comme l'une des plus grandes tragédies de la littérature française. Lors de sa première représentation, elle a suscité des réactions mitigées, mais elle est aujourd'hui reconnue pour sa profondeur psychologique et sa maîtrise du langage poétique.
Points clé de ce résumé sur Phèdre
Jean Racine, dramaturge français du XVIIe siècle, célèbre pour ses tragédies qui explorent les passions humaines et les conflits moraux.
Phèdre
1677
Tragédie classique
Phèdre raconte l'histoire de Phèdre, épouse de Thésée, qui est consumée par un amour interdit pour son beau-fils, Hippolyte. À travers des passions dévorantes et des conflits moraux, Racine explore les thèmes de l'amour, de la culpabilité et du destin.
L'amour interdit : La pièce explore les conséquences tragiques d'un amour impossible et interdit.
La culpabilité : Racine met en lumière le tourment intérieur de Phèdre, déchirée entre sa passion et son devoir moral.
Le destin : L'œuvre questionne le rôle du destin dans la vie des personnages et les conséquences inévitables de leurs actions.
"Phèdre" est souvent considérée comme l'une des plus grandes tragédies de la littérature française. Lors de sa première représentation, elle a suscité des réactions mitigées, mais elle est aujourd'hui reconnue pour sa profondeur psychologique et sa maîtrise du langage poétique.
Résumé complet sur Phèdre
Résumé court de cette pièce de Racine
Phèdre, c’est l’histoire d’un amour interdit qui fait basculer tout un royaume. Tandis qu’Hippolyte aime en secret Aricie, une princesse déchue, sa belle-mère Phèdre brûle d’un désir coupable pour lui. La rumeur de la mort du roi Thésée vient tout bouleverser : les passions éclatent, les masques tombent.
Déclarations enflammées, jalousie, mensonges… La tragédie monte en tension jusqu’au retour du roi. Manipulé par Phèdre et sa nourrice, Thésée croit son fils coupable et appelle Neptune à le punir. Trop tard pour reculer : Hippolyte meurt, traîné par ses chevaux après l’attaque d’un monstre marin.
Phèdre, rongée par la honte, confesse tout à Thésée avant de se donner la mort. Oenone, accablée, se noie. Aricie, en deuil, est recueillie par le roi. Une tragédie où l’amour, le mensonge et le destin forment un cocktail fatal.
Résumé par acte de Phèdre
Acte 1 – Un amour caché et un royaume en émoi
Thésée, roi d’Athènes, partageait son amour avec plusieurs épouses, parmi lesquelles Phèdre, qu’il traitait avec égard et égalité. Hippolyte, son fils né de l’Amazone Antiope, confie à son mentor Théramène qu’il veut quitter Trézène pour retrouver son père disparu. Mais derrière cette quête se cache une autre vérité : il aime Aricie, une ancienne princesse condamnée politiquement, qu’il croit hostile à ses sentiments.
De son côté, Phèdre lutte contre un désir interdit. Rongée par la passion, elle confesse à sa nourrice Oenone l’amour qu’elle ressent envers son beau-fils. C’est alors que la rumeur de la mort de Thésée bouleverse la cour. C’est Phèdre en personne qui porte cette nouvelle à Hippolyte.
Acte 2 – Aveux, passions et désespoir
Aricie révèle à sa servante Ismène qu’elle est éprise d’Hippolyte. Peu après, ce dernier vient lui ouvrir son cœur à son tour, allant jusqu’à lui promettre le trône d’Attique. Leur tête-à-tête amoureux est interrompu par l’arrivée de Phèdre, qui prétend d’abord défendre les droits de son fils Acamas, avant de perdre le contrôle et de faire une déclaration enflammée à Hippolyte.
Celui-ci, abasourdi, reste de marbre. Phèdre, blessée, lui arrache son épée, menaçant de se donner la mort. Heureusement, Oenone l’en empêche. Puis, une rumeur fait frémir les murs du palais : Thésée serait vivant… et Acamas aurait été proclamé roi de Crète.
Acte 3 – Retour du roi, tensions grandissantes
Thésée revient à Trézène et s’étonne de l’accueil froid qu’on lui réserve. Hippolyte, anxieux, veut fuir sa belle-mère et enfin dévoiler à son père son amour pour Aricie. Pendant ce temps, Phèdre est en proie à une honte profonde.
Dans un élan désespéré, elle veut offrir à Hippolyte le trône d’Athènes pour obtenir son amour. Prise de remords, elle supplie les dieux et Vénus de l’aider à fuir sa passion. Plutôt que d’être démasquée, elle préfère mourir. Oenone propose alors une autre issue : faire croire que le jeune homme a tenté de la séduire.
Phèdre, distante, rejette Thésée. Ce dernier commence à douter. Hippolyte veut partir de Trézène et redoute que les mensonges de Phèdre ne détruisent l’amour de son père.
Acte 4 – Le poison du mensonge
Pour protéger sa maîtresse, Oenone passe à l’action. Elle accuse Hippolyte d’avoir voulu séduire Phèdre. Thésée, en colère, implore Neptune de punir son fils. Il tente de faire parler ce dernier, mais Hippolyte avoue seulement son amour sincère pour Aricie. Déçu, Thésée bannit son propre enfant.
Phèdre, en apprenant cela, souhaite dire la vérité. Mais en découvrant qu’Hippolyte aime Aricie, elle est ravagée par la jalousie. Elle rejette les paroles apaisantes de sa nourrice et préfère maudire Oenone, incapable de supporter un amour qu’elle juge monstrueux.
Acte 5 – Destins brisés et vérités révélées
Hippolyte promet à Aricie de l’épouser et de s’enfuir avec elle. Il part seul, Aricie le rejoindra plus tard. Thésée, les ayant vus ensemble, commence à douter de la version d’Oenone. La princesse demande à le rencontrer, mais ne peut tout lui révéler.
Thésée, troublé, veut entendre Oenone, pressentant un piège. Trop tard. Neptune a agi. Un monstre marin jaillit de l’océan. Hippolyte tente de s’enfuir, mais ses chevaux, affolés, le traînent. Il succombe à ses blessures. C’est Théramène qui annonce à Thésée la terrible nouvelle.
Plein de remords, le roi réalise qu’il a été manipulé. Oenone, rejetée par Phèdre, se noie. Phèdre, consumée par la vérité et la douleur, avoue tout à son époux et se suicide en buvant un poison. Elle s’effondre, laissant Thésée impuissant face à cette tragédie.
Aricie, brisée par la perte d’Hippolyte, est recueillie par Thésée, qui en fait sa fille adoptive. Une ultime tentative pour réparer les ruines d’un drame orchestré par la passion, le mensonge et la fatalité.
Analyse des personnages dans Phèdre
Présentation des personages de ce résumé sur Phèdre
Personnage | Description | Rôle |
---|---|---|
Phèdre |
Héroïne tragique déchirée entre sa passion interdite pour Hippolyte et sa loyauté envers son mari Thésée. | Incarnation de la lutte entre désir et devoir, consumée par un amour coupable. |
Hippolyte |
Fils de Thésée, il est l'objet de l'amour interdit de Phèdre. Il aime sincèrement Aricie. | Figure de vertu et d'innocence, victime des machinations de Phèdre et de la colère de son père. |
Thésée |
Roi d'Athènes et mari de Phèdre, il est manipulé par les mensonges de celle-ci. | Héros déchu, aveuglé par la jalousie et la colère, qui provoque la mort de son fils. |
Œnone |
Nourrice et confidente de Phèdre, elle joue un rôle crucial dans la manipulation des événements. | Personnage secondaire dont les actions précipitent la tragédie. |
Aricie |
Jeune femme aimée par Hippolyte, elle représente l'amour pur et innocent. | Symbole de résistance et de fragilité, elle contraste avec la passion destructrice de Phèdre. |
Théramène |
Gouverneur d'Hippolyte, il raconte la mort tragique de ce dernier. | Messager tragique, témoin de la chute des héros. |
Ismène |
Complice d'Aricie, elle facilite les confessions et les révélations. | Personnage secondaire qui aide à faire avancer l'intrigue. |
Panope |
Suivante de Phèdre, elle délivre des informations cruciales. | Vecteur d'émotion et de tension dramatique. |
"Phèdre" est une tragédie de Jean Racine qui explore les thèmes de la passion interdite, de la culpabilité et de la fatalité à travers des personnages complexes et tourmentés.
Les personnages de Phèdre de Racine : une étude complète des âmes tourmentées
Phèdre : la passion fatale entre lumière et ténèbres
Une héroïne écartelée entre raison et désir
Phèdre occupe le devant de la scène dans la tragédie de Jean Racine comme une figure marquée par l’ambiguïté morale. Dès les premières répliques, elle incarne une femme rongée par une passion interdite, incapable de la dompter ou de la renier. Inspiré de Sénèque, Racine en livre une version plus introspective, approfondissant le "furor" amoureux qui la consume.
Une conscience tragiquement lucide
Loin d’être aveuglée, Phèdre se distingue par une lucidité dramatique qui fait d’elle bien plus qu’une simple victime. Consciente de la gravité de son amour pour Hippolyte, elle le vit comme une faute morale, ce qui déclenche en elle un combat intérieur déchirant. Son inceste amoureux devient alors le miroir de sa propre chute.
Une noblesse écrasée par les dieux
Issue de la lignée de Minos, Phèdre descend du Soleil lui-même. Pourtant, c’est dans l’ombre de la passion qu’elle s’enlise. La présence obsédante de Vénus dans la pièce donne au personnage une dimension mythologique puissante : cette déesse devient à la fois sa persécutrice et son reflet, comme si l’amour divin se transformait en malédiction personnelle.
Un voyage émotionnel aux multiples visages
Entre torpeur, violence et épiphanies intérieures, Phèdre suit un arc psychologique intense. La jalousie qu’elle nourrit envers Aricie marque un tournant dans la pièce : ce n’est plus seulement l’amour qu’elle ressent, mais un désir possessif et destructeur. À travers cette évolution, elle devient une incarnation de la contradiction humaine, entre lumière de la vérité et ténèbres de la passion.
La tension entre paganisme et culpabilité chrétienne
À la croisée des influences antiques et chrétiennes, Phèdre se dresse comme une figure tourmentée par le péché. Sa culpabilité, son besoin d’aveu et son incapacité à vivre en paix rappellent la tradition chrétienne, alors que sa fatalité tragique renvoie aux mythes grecs. Ce double héritage la rend universelle et proche d’autres héroïnes comme Thérèse Desqueyroux.
Phèdre, une âme rebelle face au monde
À travers son refus des compromis et sa quête de pureté intérieure, Phèdre rejoint la lignée des personnages tragiques qui ne peuvent ni se conformer ni s’abandonner sans douleur. Elle incarne cette race solitaire évoquée par les critiques : ceux qui ne savent pas tricher avec eux-mêmes ni avec la société, et qui en paient le prix fort.
Hippolyte : le prince vertueux face à la fatalité
Un rôle secondaire mais une présence capitale
Si Phèdre occupe la première place, Hippolyte s’impose néanmoins comme une figure centrale de la tragédie. Fils de Thésée et victime involontaire du désir de sa belle-mère, il évolue dans l’ombre d’un drame dont il n’est pas l’initiateur. Pourtant, Racine l’enrichit d’une complexité rare, le rendant plus humain que le héros mythologique des sources antiques.
Un jeune homme entre vertu et vulnérabilité
Hippolyte, traditionnellement défini par sa chasteté et son culte de Diane, devient chez Racine un personnage profondément nuancé. Il n’est plus un modèle figé de vertu, mais un être capable d’aimer, de douter et de se transformer. L’introduction de son amour sincère pour Aricie est un tournant majeur : cette relation rompt avec la tradition tout en révélant l’éveil de sa sensibilité.
Une relation père-fils marquée par la peur
Le lien entre Hippolyte et Thésée ajoute une dimension psychologique forte à la pièce. Paralysé par le respect et la crainte, le jeune homme n’ose se défendre face aux mensonges de Phèdre. Cette soumission silencieuse est sa véritable faiblesse. Dans l’adaptation de Patrice Chéreau, Thésée est présenté comme un père aveuglé, tragiquement responsable de la perte de son fils. Cette interprétation accentue le caractère sacrificiel d’Hippolyte.
Un héros innocent foudroyé par la fatalité
Le destin funeste d’Hippolyte trouve son point culminant dans le récit poignant de Théramène. Sa mort provoquée par un monstre marin, exaucée par Neptune, incarne une injustice tragique. Pourtant, c’est dans sa fidélité à Aricie que le personnage atteint sa grandeur : il meurt sans renier son amour, conservant intacte sa dignité. Une fin qui transcende le personnage et l’ancre dans la mémoire du spectateur.
Thésée : le héros déchu face à ses erreurs
Une figure mythologique à l’épreuve de la tragédie
Thésée incarne le héros antique dont la grandeur passée vacille au contact de la réalité humaine. Dans la tragédie de Racine, son retour inattendu à Trézène déclenche une série de malentendus tragiques. Son incapacité à lire les signes dans son propre entourage révèle une fragilité inattendue chez ce roi autrefois glorieux.
Entre exploits d’antan et failles présentes
Racine oppose habilement la légende de Thésée — héros des Amazones et séducteur légendaire — à un homme désormais dépassé par les intrigues qui l’entourent. Il devient alors un "roi aveuglé", trahi non par ses ennemis, mais par ceux qu’il aime et en qui il a confiance. Cette fragilité ne fait qu’accentuer sa dimension tragique.
La fatalité divine comme piège ultime
La relation entre Thésée et Neptune joue un rôle fondamental dans l’issue dramatique. Ce dieu, jadis allié, devient instrument de la ruine familiale. En invoquant son dernier vœu pour punir son fils, Thésée agit sous l’impulsion d’un cœur aveuglé, signant sans le savoir la fin de sa lignée. Une hybris classique qui marque son destin.
Une lente descente vers l’effondrement
Dans l’interprétation scénique de Patrice Chéreau, Thésée apparaît vêtu de rouge, silhouette ployée sous le poids de la culpabilité. Cette image, frappante de symbolisme, traduit son évolution : d’un roi sûr de lui à un homme brisé par la mort de son fils, il devient spectateur impuissant d’une vérité trop tard dévoilée.
Un roi frappé par la solitude et le remords
À la fin de la pièce, Thésée se retrouve seul, vidé de tout ce qui faisait sa force. Il perd Phèdre, Hippolyte et sa propre estime, incapable de réparer les torts causés. Son pardon à Aricie n’a plus le pouvoir d’atténuer la douleur. Il symbolise alors l’échec de la justice humaine confrontée aux passions destructrices.
Œnone : la confidente aux conseils fatals
Un rôle secondaire à l’impact dramatique majeur
Bien qu’elle ne soit pas l’héroïne, Œnone occupe une place stratégique dans le récit tragique de Racine. En tant que nourrice et confidente de Phèdre, elle agit comme un levier dramatique essentiel. Ses choix, souvent dictés par son amour démesuré pour sa maîtresse, accélèrent la chute de plusieurs personnages clés.
La loyauté comme force et faiblesse
Ce qui définit Œnone, c’est sa fidélité sans bornes à Phèdre. Elle agit constamment pour la préserver, quitte à s’opposer à sa morale. Lorsqu’elle empêche sa maîtresse de se donner la mort, elle incarne l’instinct de conservation face à un désespoir profond. Mais ce dévouement aveugle devient un poison, car il lui fait perdre tout discernement.
Du conseil protecteur à la faute irréparable
Œnone franchit un point de non-retour lorsqu’elle incite Phèdre à accuser Hippolyte avant que celui-ci ne puisse la dénoncer. Dans un élan de panique, elle choisit la ruse et l’honneur apparent au détriment de la vérité. Ce glissement moral transforme sa loyauté en manipulation dramatique qui bouleverse le cours des événements.
Une servante qui influence sa reine
La dynamique entre Œnone et Phèdre montre à quel point le pouvoir n’est pas toujours là où on l’attend. Si elle est officiellement subalterne, Œnone parvient à guider Phèdre dans ses moments de doute. Cependant, cette influence fragile se brise lorsque Phèdre découvre la vérité. Le rejet qu’elle inflige à Œnone est violent et définitif.
Une disparition discrète mais lourde de sens
La mort de Œnone, évoquée de façon brève, tranche avec celle d’autres personnages plus en lumière. Elle se jette dans les flots, emportant avec elle la honte, le chagrin et le poids d’avoir provoqué l’injustice. Cette fin silencieuse marque pourtant une prise de conscience tardive, révélant la dimension tragique d’un personnage trop souvent dans l’ombre.
Aricie : l'amour innocent au cœur des intrigues
Une création racinienne au service de la tension dramatique
Aricie est une invention originale de Racine, absente des versions antiques du mythe. Son apparition dans la pièce vient renouveler les dynamiques amoureuses. En tant que dernière descendante des Pallantides, elle symbolise à la fois la fragilité et la résistance, tout en cristallisant des tensions politiques et sentimentales.
Un amour pur dans un monde dévoré par la passion
À travers la relation entre Aricie et Hippolyte, Racine introduit un amour apaisé, sincère, et profondément humain. Ce lien contraste violemment avec le désir obsédant de Phèdre. Loin de la passion coupable, Aricie incarne la possibilité d’un amour innocent dans un environnement rongé par le conflit intérieur et les pulsions incontrôlables.
Une présence féminine porteuse de symboles mythologiques
Dans la pièce, Aricie peut être perçue comme une projection terrestre de Diane, déesse de la chasteté, en opposition directe à Vénus, figure tutélaire de Phèdre. Par cette dualité, Racine oppose deux types d’amour : l’un sacré et lumineux, l’autre tragique et dévorant. Aricie devient alors un point d’équilibre moral.
Un enjeu politique masqué sous l’apparence de la douceur
La jeune femme n’est pas qu’une amoureuse ou une victime. Son statut politique en tant que rescapée des Pallantides fait d’elle une figure menaçante pour Thésée. Son union avec Hippolyte pourrait bouleverser la succession, ce qui rend son rôle capital dans les mécanismes de pouvoir présents dans la tragédie.
Deux femmes, deux destins féminins opposés
Face à Phèdre, Aricie représente une autre manière d’être femme dans l’univers tragique. Elle n’a ni le poids de la culpabilité ni la fièvre du désir interdit. Malgré sa captivité, elle conserve son intégrité. Sa jeunesse et sa lucidité offrent un contrepoint à la maturité tourmentée de Phèdre, et enrichissent la tension entre innocence et déchéance.
Les personnages secondaires et leur fonction dramatique
Dans Phèdre, les personnages secondaires sont loin d’être anecdotiques. Même si leur présence sur scène est limitée, leur fonction est déterminante pour le rythme de l’intrigue et la profondeur émotionnelle de la pièce. Racine les utilise comme leviers narratifs, pour faire avancer l’action, livrer des informations cruciales ou incarner un point de vue extérieur sur les passions déchaînées.
Théramène : un messager à la voix épique
Théramène, fidèle gouverneur d’Hippolyte, joue un double rôle : confident et narrateur. Son récit final — Acte V, scène 6 — est l’un des plus célèbres du théâtre classique. Grâce à lui, Racine transforme une scène invisible en un moment poétique d'une intensité rare, où l’imagination du spectateur complète l’horreur décrite. Il incarne ainsi la figure traditionnelle du messager tragique.
Un témoin du déclin héroïque
Présent aux côtés de Thésée dans les ultimes instants, Théramène endosse également le rôle de témoin du désastre. Par sa présence calme et observatrice, il offre un regard plus lucide sur l'effondrement moral du roi et la perte d’Hippolyte. Sa parole, mesurée, contraste avec la fureur des passions qui agitent les autres personnages.
Ismène et Panope : les voix discrètes de l’intimité
Ismène, complice d’Aricie, et Panope, suivante de Phèdre, incarnent deux présences féminines secondaires mais structurantes. Elles facilitent les confessions, les transitions et les révélations. Leurs interventions, bien que brèves, permettent aux héroïnes d’exprimer leurs sentiments, renforçant l’empathie du public envers elles.
Le rôle informatif des servantes
Par leur fonction d’annonce, Ismène et Panope deviennent des vecteurs d’émotion et de tension dramatique. Panope, notamment, délivre deux informations capitales : la mort supposée de Thésée, puis son retour inattendu. Ces nouvelles bouleversent l’équilibre des personnages, montrant à quel point les figures secondaires agissent comme des catalyseurs.
Les dieux : invisibles mais omniprésents
Le panthéon grec reste invisible sur scène, mais son emprise sur l’action est absolue. Vénus, Neptune et le Soleil influencent profondément le destin des mortels. Par leur symbolisme, ils incarnent les forces opposées : passion, vengeance, honte, justice. Le drame humain prend ainsi une dimension cosmique, où les dieux reflètent les désordres intérieurs des héros.
Une mythologie au service de la tragédie
Racine ne convoque pas ces divinités pour le simple décorum antique. Elles nourrissent une économie symbolique qui donne du poids aux passions humaines. Vénus domine Phèdre, Neptune détruit Hippolyte, le Soleil juge silencieusement sa descendante. Ensemble, ils construisent un univers où le destin semble scellé d’avance, donnant au drame une puissance tragique amplifiée.
L'orchestration des passions dans la tragédie racinienne
La tragédie Phèdre de Jean Racine repose sur une construction psychologique d’une rare intensité, où chaque personnage, même secondaire, joue un rôle précis dans la mise en scène des passions. L’ensemble forme une architecture émotionnelle profondément cohérente et bouleversante, révélant les fêlures de l’âme humaine sous la pression du désir, de la honte et du destin.
À travers une analyse fine des protagonistes, on comprend comment Racine transforme un mythe ancien en une réflexion universelle sur la condition humaine. De Phèdre, écartelée entre remords et pulsion, à Hippolyte, victime silencieuse de son respect filial, en passant par Thésée, aveuglé par son orgueil, Œnone, loyale jusqu’à la faute, ou Aricie, incarnation d’un amour sincère, chaque figure donne corps à une facette du drame intérieur.
Racine dépasse le cadre mythologique pour intégrer une réflexion morale et religieuse d’une grande modernité. Par le biais des dieux antiques – Vénus, Neptune, le Soleil – il aborde des thèmes éminemment chrétiens : la culpabilité, la rédemption, ou encore le libre arbitre. Le tourment de Phèdre incarne un furor tragique, une fièvre émotionnelle qui résonne avec les visions du péché et de la grâce propres au XVIIe siècle.
Ce qui fait la force de Phèdre, c’est cette capacité à croiser les règles strictes du théâtre classique avec une véracité émotionnelle saisissante. Les passions y deviennent des forces cosmiques, presque mystiques, "exaltées et obscurcies par les miroirs d'une religion imaginaire". Cette densité dramatique continue de toucher les lecteurs d’aujourd’hui, car elle parle à ce que nous avons de plus intime : la lutte entre ce que l’on veut, ce que l’on doit, et ce que l’on est.
Phèdre de Racine : Analyse Littéraire Complète
Phèdre captive les lecteurs et les spectateurs depuis sa création en 1677. Si tu te demandes pourquoi cette œuvre est encore étudiée aujourd’hui et ce qu’elle peut t’apporter, tu es au bon endroit.
À travers son héroïne déchirée entre passion et morale, Racine te plonge dans les abîmes de la psychologie humaine, explore les tensions d’un amour interdit, et met en scène le poids écrasant de la fatalité. Ces thématiques, toujours d’actualité, font de Phèdre un miroir puissant de nos dilemmes intérieurs.
Cette analyse complète t’aidera à comprendre et apprécier pleinement ce chef-d’œuvre du théâtre classique. Que tu sois lycéen, étudiant ou simple curieux, tu y trouveras toutes les clés de lecture pour naviguer dans la complexité de la pièce, et en saisir toute la richesse émotionnelle et symbolique.
Phèdre et son contexte : un joyau du théâtre classiqu
Une création dans la tourmente
Considérée aujourd’hui comme un sommet du théâtre classique français, Phèdre n’a pourtant pas connu un démarrage paisible. Créée le 1er janvier 1677 à l’Hôtel de Bourgogne sous le titre Phèdre et Hippolyte, la tragédie a immédiatement été confrontée à une concurrence frontale : la pièce homonyme de Nicolas Pradon, jouée deux jours plus tard à l’Hôtel Guénégaud. Cette double création déclenche une querelle littéraire mémorable surnommée l’Affaire des sonnets, qui déchaîne les partisans des deux camps.
Malgré cette rivalité, l’écriture racinienne fait rapidement la différence : la pièce de Pradon sombre dans l’oubli tandis que celle de Racine s’impose avec éclat. L’auteur lui-même n’hésite pas à considérer Phèdre comme son chef-d’œuvre, comme il l’écrit dans sa préface. Cette tragédie marque également un tournant dans sa carrière, puisqu’elle sera sa dernière œuvre profane avant douze années de silence littéraire et un engagement au service du roi Louis XIV.
Les sources d'inspiration : entre mythologie et tragédie antique
Pour composer Phèdre, Racine plonge dans le répertoire antique, en particulier la pièce d’Euripide : Hippolyte porte-couronne (428 av. J.-C.). À cela s’ajoute l’influence notable de Sénèque, dont la propre Phèdre — empreinte de stoïcisme — inspire notamment le récit de Théramène, célèbre pour sa force évocatrice.
Mais Racine ne se limite pas à ces deux sources. Il puise également dans les Héroïdes d’Ovide et dans l’Énéide de Virgile, intégrant des éléments poétiques et narratifs pour enrichir la texture dramatique de son œuvre. Ce croisement de références démontre sa capacité à réinterpréter les mythes antiques avec modernité, finesse psychologique et intensité émotionnelle.
En mêlant ces différentes inspirations, Racine parvient à créer une tragédie profondément originale, fidèle à l’esprit antique mais intensément ancrée dans les sensibilités de son temps. C’est ce mélange d’héritage et d’innovation qui confère à Phèdre sa force intemporelle.
Structure et intrigue de cette pièce de Racine : une mécanique tragique parfaite
Acte par acte : la descente aux enfers
La tragédie Phèdre de Jean Racine s’articule autour de cinq actes, construits comme les étapes d’une chute irréversible vers le désastre. Chaque acte marque une montée en tension, jusqu’à l’explosion finale des passions et des destins brisés. Cette progression, d’une implacable logique dramatique, est emblématique du théâtre classique français.
Acte I : Morts et aveux – L’acte d’exposition pose les bases du drame. HippolyteAricie, tandis que Phèdre, rongée par une passion coupable, confesse à Œnone son trouble pour son beau-fils. L’annonce de la supposée mort de Thésée bouleverse l’équilibre politique et affectif, laissant place à toutes les incertitudes.
Acte II : Une double déclaration d’amour – Les sentiments s’expriment : Hippolyte déclare son amour à Aricie, puis Phèdre, désespérée, fait à son tour une déclaration enflammée au jeune homme. Ce dernier reste froid, et la tension monte lorsque Théramène révèle que Thésée pourrait être encore en vie.
Acte III : Le retour du roi Thésée – Le drame bascule avec le retour inattendu de Thésée. Phèdre, paniquée, accepte le plan d’Œnone : faire accuser Hippolyte de tentative de séduction. Le jeune homme, par respect filial, choisit le silence, s’enfonçant ainsi dans l’injustice.
Acte IV : Calomnie et malédiction – Œnone va jusqu’au bout de sa stratégie et accuse Hippolyte devant Thésée. Le roi, aveuglé par la colère, invoque Neptune pour châtier son fils. De son côté, Phèdre, apprenant l’amour d’Hippolyte pour Aricie, refuse de le défendre, dominée par la jalousie.
Acte V : Morts et expiation – Le rideau tombe dans le sang et le remords. Hippolyte meurt, tué par un monstre marin envoyé par Neptune. Phèdre, empoisonnée, confesse enfin la vérité à Thésée. Le roi, accablé, promet d’honorer son fils disparu et de faire d’Aricie sa fille adoptive.
Une construction dramatique exemplaire
Racine respecte avec rigueur les trois unités du théâtre classique : l’unité d’action (la passion de Phèdre), l’unité de lieu (le palais de Trézène), et l’unité de temps (une seule journée). Cette structure concentrée renforce l’intensité dramatique et amplifie la chute inexorable des personnages. Chaque scène est tendue, chaque aveu irrémédiable. Ce choix dramaturgique sublime le destin tragique, plaçant Phèdre au sommet de l’art racinien.
Les personnages dans Phèdre : des âmes déchirées par la passion
Phèdre : une héroïne tragique parfaite
Phèdre demeure l’un des personnages les plus marquants de l’univers racinien. Elle incarne à la perfection la figure de l’héroïne tragique, prise entre faute et vertu, entre passion et lucidité. Racine la décrit comme « ni tout à fait coupable ni tout à fait innocente », une formule devenue emblématique de sa complexité psychologique.
Fille de Minos et Pasiphaé, Phèdre subit la malédiction de Vénus, qui poursuit sa lignée. Sa passion pour Hippolyte la consume intérieurement, comme elle le confesse dans des vers devenus célèbres :
Ce n'est plus une ardeur dans mes veines cachée,
C'est Vénus tout entière à sa proie attachée.
Ce qui rend Phèdre si bouleversante, c’est sa conscience aiguë de sa faute. Elle connaît la gravité de son amour, mais n’a pas la force de s’y soustraire :
Ne pense pas qu'au moment que je t'aime,
Innocente à mes yeux, je m'approuve moi-même.
C’est cette lutte intérieure constante qui fait d’elle un personnage à la fois tragique et profondément humain.
Hippolyte : au-delà du prince vertueux
Hippolyte, fils de Thésée et de l’Amazone Antiope, apparaît d’abord comme un modèle de vertu et de chasteté, fidèle à Artémis. Mais Racine va plus loin que ses prédécesseurs antiques, notamment Euripide, en lui donnant une dimension amoureuse inédite : il aime Aricie, une princesse interdite par le pouvoir royal.
Ce changement crée un contraste fort entre l’amour pur d’Hippolyte et la passion destructrice de Phèdre. Pris entre son devoir de fils et son cœur, il devient un personnage tiraillé, plus complexe qu’il n’y paraît. Sa dignité et son intégrité morale ressortent dans cette réplique forte :
Le jour n'est pas plus pur que le fond de mon cœur.
Par ces mots, Hippolyte affirme son innocence face aux accusations injustes de son père.
Thésée : le roi aveuglé
Héros mythologique par excellence, Thésée revient dans la tragédie comme un roi glorieux… mais profondément faillible. Son retour à Trézène, alors qu’on le croyait mort, déclenche l’engrenage fatal. Il est aveuglé par sa confiance en Phèdre et sa suspicion envers Hippolyte.
Son incapacité à voir clair fait de lui l’instrument du destin, notamment lorsqu’il invoque Neptune pour châtier son fils. Sa prise de conscience, trop tardive, s’exprime dans une plainte qui traduit toute la cruauté du destin :
Inexorables Dieux qui m'avez trop servi !
Cette phrase concentre toute la douleur d’un père piégé par sa colère et manipulé par le malentendu.
Œnone : la nourrice complice
Si Œnone n’est pas au centre de l’intrigue, son influence est décisive. Nourrice et confidente de Phèdre, elle devient la conseillère de l’ombre, celle qui pousse sa maîtresse à vivre, puis à mentir. Racine justifie ce choix dans sa préface :
Quelque chose de trop bas et de trop noir devait être mis dans la bouche d'une servante, non d'une princesse.
Par souci de bienséance, c’est donc Œnone qui porte la faute de la calomnie. Mais ce dévouement aveugle à Phèdre la mène à sa propre perte. Rejetée, désespérée, elle se suicide, emportée par la noirceur de ses propres choix, victime de l’engrenage tragique qu’elle a elle-même enclenché.
Les grands thèmes de Phèdre : des passions destructrices à la fatalité inexorable
L'amour fatal : Éros et Thanatos
L’un des axes majeurs de Phèdre réside dans sa représentation de l’amour comme force destructrice. Racine illustre comment une passion contraire à l’ordre établi peut devenir une impulsion vers la mort. L’amour et la mort — Éros et Thanatos — s’enlacent étroitement tout au long de la pièce.
Phèdre, consciente du caractère interdit de son amour, pressent très tôt son issue tragique. Dès l’ouverture, elle envisage le suicide, interrompu seulement par l’intervention d’Œnone. Elle vit sa passion comme une malédiction physique :
D'un incurable amour remèdes impuissants !
Chez Racine, cette passion irrépressible s’inscrit dans une tradition antique, mais est sublimée par une dimension morale et religieuse, teintée du jansénisme auquel l’auteur adhérait.
La fatalité : le sang et les dieux
Le destin tragique des personnages est étroitement lié à leur lignée et à l’intervention des dieux. Le poids de l’héritage — le "sang" — lie les protagonistes à des malédictions qu’ils ne peuvent fuir. Phèdre, descendante du Soleil, subit la vengeance de Vénus qui poursuit sa famille :
Ces Dieux qui se sont fait une gloire cruelle
De séduire le cœur d'une faible mortelle.
Hippolyte, lui, paie son mépris pour Vénus, qu’il a toujours préféré à Artémis. L’appel de Thésée à Neptune scelle son destin. Cette vision tragique chez Racine dépasse la mythologie antique et rejoint une perspective janséniste : les personnages sont déjà condamnés, car privés de la grâce divine.
Le monstrueux : métaphore de la transgression
La figure du monstre traverse l’ensemble de la pièce comme une image puissante de la déviance morale. Le passé de Phèdre est marqué par le Minotaure, son demi-frère, né d’une union contre nature. Cette lignée monstrueuse fait écho à son propre désir interdit.
Le monstre marin qui cause la mort d’Hippolyte incarne visuellement la passion dévorante de Phèdre :
Son front large [...] armé de cornes menaçantes.
Phèdre se désigne elle-même comme un monstre moral, et Thésée utilise ce même terme pour accuser son fils. Cette récurrence souligne la transgression de chacun, dans un monde où l’ordre naturel est constamment bafoué.
La parole et le silence : le pouvoir des mots
Dans Phèdre, les mots possèdent une puissance redoutable. Parler peut être fatal, mais se taire peut l’être tout autant. La tragédie avance grâce à ce fragile équilibre entre aveu et silence, entre vérité et manipulation.
L’aveu de Phèdre à Hippolyte déclenche la série des malheurs. Les paroles d’Œnone, puis celles de Thésée, scellent les destinées. Hippolyte, par fidélité à son père, choisit le silence, ce qui le mène à la mort. Phèdre reconnaît elle-même le poids de son aveu :
J'ai dit ce que jamais on ne devait entendre.
Ce thème du verbe tragique — performatif, irréversible — est au cœur de la dramaturgie racinienne. Chaque parole pèse, chaque silence condamne.
L'écriture racinienne : entre perfection et musicalité
Une versification impeccable
Jean Racine est unanimement salué pour la rigueur et la beauté de sa versification. Dans Phèdre, il compose 1654 alexandrins d’une grande fluidité, respectant les règles strictes du théâtre classique tout en leur insufflant une musicalité remarquable. Certains vers sont devenus emblématiques, à l’image de celui-ci :
La fille de Minos et de Pasiphaé.
Ce vers, d’une simplicité trompeuse, évoque l’identité de Phèdre tout en condensant plusieurs dimensions : la noblesse de son ascendance (Minos, roi de Crète et juge infernal), et l’hérédité de la transgression par sa mère Pasiphaé, coupable d’un amour monstrueux. En un seul vers, Racine articule origine, tragédie et fatalité.
Un langage au service des passions
Le génie de Racine réside dans sa capacité à mettre la langue au service de l’émotion. Il parvient à exprimer des passions extrêmes à travers un langage sobre, élégant, mais chargé d’une intensité dramatique puissante. Les figures de style abondent, rendant les non-dits aussi puissants que les aveux explicites.
Les périphrases sont souvent utilisées pour éviter de nommer directement ce qui est honteux ou douloureux. Ainsi, Phèdre ne dit pas "Hippolyte", mais choisit une formulation détournée :
Ce fils de l'Amazone, ce prince si longtemps par moi-même opprimé.
Ce détour lexical traduit l’ambiguïté du sentiment : un mélange de désir et de culpabilité. Quant aux métaphores, elles traduisent la violence des émotions ressenties, comme dans cette description célèbre du trouble amoureux :
Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue,
Un trouble s'éleva dans mon âme éperdue.
Chaque vers devient un écho aux tourments intérieurs des personnages. Ainsi, la versification n’est pas seulement une contrainte formelle, mais un outil de précision pour explorer la complexité des passions humaines.
Pourquoi lire Phèdre en 2025 ?
Une tragédie exemplaire
Phèdre est souvent citée comme le modèle parfait de la tragédie classique française. Elle incarne les principes esthétiques et philosophiques définis par Aristote, notamment la mimèsis – l’imitation fidèle et stylisée du réel – et la catharsis, cette purgation des passions que le spectateur expérimente face au destin des personnages.
La dimension morale de l’œuvre est centrale : elle cherche à démontrer le chaos engendré par les passions incontrôlées. Dans sa préface, Racine lui-même rappelle la finalité pédagogique de la pièce :
Les passions n'y sont présentées [...] que pour montrer tout le désordre dont elles sont causes.
Phèdre ne se contente donc pas de raconter un drame : elle invite à la réflexion sur les excès du cœur humain.
Un rayonnement international
Le succès de Phèdre dépasse largement les frontières de la France. La pièce a été traduite dans de nombreuses langues, parfois par de grands noms de la littérature mondiale. En allemand, elle a été adaptée par Friedrich von Schiller, en anglais par Ted Hughes, et en italien par Giuseppe Ungaretti.
Son influence s’étend également à la musique. Des compositeurs comme Jean-Philippe Rameau avec son opéra Hippolyte et Aricie (1733), ou encore Benjamin Britten avec sa cantate dramatique Phaedra (1975), se sont inspirés de cette tragédie pour en proposer des interprétations musicales puissantes.
Une œuvre qui continue de parler aux contemporains
Si Phèdre reste une œuvre majeure, c’est parce qu’elle interroge des thèmes intemporels : le désir interdit, la culpabilité, la tension entre passion et raison, le poids écrasant du destin. Ces éléments résonnent toujours avec la sensibilité moderne.
Les mises en scène contemporaines ont su renouveler sa lecture. Celle de Patrice Chéreau en 2003 en est un exemple marquant. Le metteur en scène y révèle une Phèdre charnelle, fragile et profondément humaine, la présentant non plus comme un simple objet du désir mais comme un sujet à part entière :
Une Phèdre profondément humaine, sensuelle et charnelle, véritable sujet désirant plutôt qu’objet désiré.
Preuve que quatre siècles plus tard, le texte de Racine continue de bouleverser et d’inspirer.
Phèdre, une pièce inépuisable
Phèdre demeure un monument incontournable de la littérature française, à la fois par sa forme et par son contenu. À travers le personnage de cette femme écartelée entre raison et passion, Racine nous livre une plongée vertigineuse dans les profondeurs de l’âme humaine. La justesse de la langue, la finesse psychologique des protagonistes et l’universalité des thèmes en font une tragédie qui traverse les siècles sans perdre de sa force.
Pour les élèves d’aujourd’hui, Phèdre ne se limite pas à un "texte à analyser". C’est une œuvre vivante, vibrante, qui pose des questions essentielles sur la nature humaine : qu’est-ce que le désir ? Jusqu’où peut nous mener la culpabilité ? Sommes-nous libres ou condamnés par notre destin ?
C’est probablement là le génie de Racine : avoir créé des personnages si humains, que leurs émotions continuent de résonner même trois siècles plus tard. La tragédie de Phèdre, c’est aussi la nôtre, quand nos élans se heurtent à nos limites, quand le cœur et la morale ne parviennent plus à cohabiter.
Rien ne résume mieux cette souffrance que les mots mêmes de l’héroïne, dans un moment de lucidité tragique :
Tout m'afflige et me nuit et conspire à me nuire.
Cette phrase incarne la fatalité tragique : un être lucide, accablé par des forces trop puissantes, qu'elles soient divines, sociales ou intérieures. Et c’est bien là, dans cette tension insoutenable, que Racine touche à l’universel.
Écrite à Paris le 1er janvier 1677 sous le titre Phèdre et Hippolyte, Phèdre est une tragédie en vers et en cinq actes de Jean Racine, un auteur français. Il n’adopta le titre Phèdre qu’en 1687, lors de la seconde édition de ses Œuvres. Il s’agit d’une histoire inspirée de la mythologie grecque dans laquelle la réalité rejoint la fiction d’une façon poétique. Elle relate l’amour passionnel que l’épouse d’un roi ressent à l’égard de son fils.
Résumé scène par scène
Les principaux personnages
Analyse de la pièce
Une tragédie janséniste de la fatalité
Même s’il s’est écarté de Port-Royal, Racine est toujours resté fidèle à la notion de fatalité propre aux jansénistes. Même si l’homme peut croire et se battre, il demeure prisonnier d’un destin de ressort divin qu’il ne peut pas contrôler. C’est ce que Phèdre n’arrête pas de proclamer en invoquant la lignée dont elle est la dernière descendante.
Phèdre est une tragédie qui se développe par degrés, à partir d’un mouvement initial irréversible. Le spectateur peut lire la mort d’Hippolyte telle une action des dieux prouvant leur contrôle sur la vie humaine.
Des passions plus que troubles
L’amour dans la pièce se cabre d’autant plus qu’il est interdit : interdit par la loi morale pour Phèdre et interdit par le pouvoir en ce qui concerne Aricie. A la jonction de ces deux interdits se situe Thésée. On voit en lui la figure de la loi plus que celle du père. Une telle assimilation n’est pas fortuite, car c’est justement cet homme du désir qui représente l’interdiction du désir.
Ici, la loi cache un réel dysfonctionnement sous l’apparence de l’ordre. Sous la malédiction qui frappe Phèdre se lit le dénouement tragique du détraquement de l’économie du désir engendré par le roi lui-même. Pas étonnant que son fils, qui n’est autre que le fruit de son désir, doit mourir par l’ordre qu’il donne, mis à mort par l’entremise du dieu Neptune, en annulant ainsi sa descendance.