Littérature

Molière, L’Ecole des Femmes : résumé, personnages et analyse

Couverture de l'analyse textuelle sur L'Ecole des Femmes de Molière, avec un récapitulatif, une exploration des protagonistes et une étude littéraire.
Ecrit par Les Résumés

Présentée en cinq actes et en vers, L’École des femmes est une comédie novatrice de Molière, un auteur français, de par sa fusion inédite des ressources de la grande comédie en vers et de la farce. Créé le 26 décembre 1662 au théâtre du Palais-Royal et rédigé suivant les règles de la dramaturgie traditionnelle, ce chef-d’œuvre connaît un véritable succès et suscite des débats nommés « Querelle de L’École des femmes ».

Résumé de la pièce acte par acte de L’Ecole des Femmes de Molière

Acte 1

En ville, Arnolphe et Chrysalde, deux bourgeois, entretiennent une discussion. Arnolphe informe à son ami qu’il va épouser le lendemain Agnès, une jeune fille de 17 ans. Même s’il en faisait croire l’inverse, le bourgeois est toujours obsédé par l’idée de devenir cocu et précise qu’il a établi une stratégie infaillible afin de se faire marier par une femme qui ne le trompera pas. En effet, il a fait élever Agnès depuis toute petite dans un couvent, tout en la privatisant de toute éducation. Il l’a fait enfermer par sa servante et son valet, Georgette et Alain, dans une maison.

Se faisant appelé M. de la Souche, Arnolphe rentre d’un voyage de 10 jours et rencontre Horace, fils de son ami de longue date Oronte. Il encourage Horace à s’amuser avec des femmes mariées, aux dépens des maris imprudents, et se propose même de lui offrir de l’argent afin de l’aider à conquérir ces femmes. De manière naïve, Horace lui apprend pourtant qu’il a déjà réussi à conquérir le cœur d’une certaine Agnès, pupille d’un homme nommé M. de la Souche qu’il voit comme un barbon ridicule et tyrannique. Vexé, Arnolphe a du mal à contenir son agacement.

Acte 2

Très intrigué par les révélations d’Horace, le bourgeois veut tout savoir et donc questionner Agnès, Georgette et Alain. La servante et le valet ont peur lorsque leur maître les interroge, fou de rage, et lui apprend alors qu’un homme est venu au cours de son absence. Il se tourne ensuite vers Agnès. Celle-ci relate qu’elle a rencontré un jeune homme qui lui a fait une déclaration d’amour. Il lui a également pris le ruban qu’Arnolphe lui avait donné. Persuadé que cette mésaventure est liée à l’ignorance de sa fiancée, Arnolphe annonce à Agnès que seul le mariage autorise les gentillesses amoureuses et qu’il va l’épouser dans la soirée. Il force aussi la jeune femme à chasser Horace à coups de pierres s’il revient.

Acte 3

Arnolphe est ravi, puisqu’Agnès lui a obéi en jetant une pierre à Horace. La noce va se dérouler et le notaire doit arriver. Le futur marié décide donc d’inculquer à sa future femme les rudiments des devoirs conjugaux et lui fait lire « Les maximes du mariage ou les devoirs de la femme mariée ».

M. de la Souche croise ensuite Horace qui lui relate le bilan de ses aventures amoureuses : le maître de sa bien-aimée a appris leur relation et il a été chassé par les valets lorsqu’il a tenté d’entrer chez elle. Toutefois, Agnès a trouvé un moyen de lui remettre une correspondance qu’elle a cachée dans un grès. Il la lit devant Arnolphe. La belle y paraît si innocente et très adorable, et demande à Horace de lui avouer s’il cherche à la tromper ou pas. Seul, Arnolphe pleure son malheur et reconnaît qu’il éprouve de l’amour pour la jeune fille.

Acte 4

Pendant un long monologue, le bourgeois montre sa volonté de se battre et de préserver Agnès pour lui. Après un quiproquo, son entrevue avec le notaire se conclut par un report du mariage. Il transforme son domicile en camp retranché et se comporte très autoritairement, mais ses efforts demeurent vains. Horace lui relate ensuite qu’il était enfermé dans l’armoire par la jeune fille, alors que M. de la Souche allait et venait dans sa chambre. Il lui avoue également qu’il prévoit d’enlever Agnès en escaladant le balcon le soir même. Débarque alors Chrysalde qu’Arnolphe a invité à dîner. L’hôte désire se débarrasser d’Horace, mais son ami essaie de le raisonner. Ses instructions drastiques tombent : Georgette et Alain doivent chasser le jeune homme à coups de bâton.

Acte 5

Les domestiques disent à Arnolphe qu’ils ont fait ce qu’il fallait et qu’Horace est désormais hors d’état de nuire. Cependant, le maître de maison retrouve Horace qui se dirige chez lui : il a encore été dupé. Le jeune homme dit qu’il est tombé dans un guet-apens tendu par les serviteurs de M. de la Souche et que sa seule issue était de faire le mort. Alors que le maître se lamentait, Agnès est descendue, pensant que son amoureux est mort, et s’est enfuie avec lui. Horace demande alors à son ami de trouver un refuge pour la jeune femme. Ignorant encore la véritable identité de M. de la Souche, il implore celui-ci d’héberger et de protéger son amoureuse. Le barbon pense donc triompher. Le bas du visage dissimulé dans son manteau, Arnolphe tire Agnès par la main et ne se montre que quand Horace est parti. Furieux, il lui fait des réprimandes, mais la jeune fille répond avec bon sens. Il lui fait ensuite un discours exalté sur les sentiments qu’il ressent pour Agnès, lesquels ne rencontrent que l’indifférence de la jeune fille.

De retour d’un long périple aux Amériques, le seigneur Enrique veut organiser le mariage de sa fille à Horace, fils de son ami Oronte qui vient aussi de rentrer de voyage. Horace demande à M. de la Souche d’interférer en sa cause auprès de son père. Pourtant, Arnolphe veut trahir le jeune homme et incite Oronte à précipiter la noce et à ne pas prendre en compte des caprices de son fils. Par hasard, Horace finit par découvrir le second nom d’Arnolphe. Ce dernier est sur le point de gagner, mais son ami Enrique explique que c’est Agnès qui doit se marier avec Horace et que cette fille abandonnée n’est autre que sa propre fille. Les deux amants vont donc pouvoir se marier, au grand désespoir de l’ancien tuteur. Égaré, Arnolphe s’en va, « tout transporté et ne pouvant parler ».

Son ami Chrysalide lui explique alors gentiment que c’est sans doute la meilleure chose qui puisse lui arriver. En effet, pour ne pas être cocu, la meilleure façon d’y parvenir est de ne pas se marier.

Les personnages principaux

Arnolphe

Personnage du cocu maladif, Arnolphe est plutôt un rôle comique récurrent dans le chef-d’œuvre de l’auteur. Il est le personnage traditionnel du comique à la française, ainsi que de la farce italienne : le vieux et amoureux bourgeois de 42 ans qui tombe dans les farces d’une jeune fille de 17 ans, amoureuse d’un jeune homme de son âge.

Dans cette comédie, la nouveauté est de remarquer que ce personnage recèle au plus profond de lui autant de comique que de tragique. Effectivement, il cherche à faire grimper sa condition sociale et désire se marier avec une femme afin de la dominer. Une farce dramatique où l’unique rôle qu’il trouve est celui de marionnette. Alors qu’il est le premier à désirer épouser une femme innocente afin de la modeler à sa façon. Ainsi, il espère fuir les effets néfastes de l’infidélité.

Agnès

Ce personnage féminin désire plus que tout l’amour, mais refuse d’être manipulé. Elle établit donc une fourberie afin de déjouer les artifices de son tuteur, qui l’a élevé au couvent. Déterminée à aimer Horace, elle refuse de se laisser prendre dans la trappe d’Arnolphe. Agnès s’impose par sa capacité à régenter les émotions de son vieil aspirant, ainsi que par son intelligence. Elle symbolise la hardiesse d’esprit et la jeunesse dont doivent faire preuve les jeunes filles afin d’atteindre leur objectif.

Horace

Il s’agit de l’amant de la belle Agnès. Il désire l’épouser, mais il a mal choisi son confident en la personne de M. de la Souche, qui n’est autre que le vieux Arnolphe. En outre, il n’est pas soutenu par son propre père qui veut le voir marié avec la fille de son ami Enrique.

Chrysalde

Il est le confident et ami de longue date d’Arnolphe. Il symbolise la clarté d’esprit et la sagesse qu’un homme mûr est censé avoir. Il tente à tout prix de raisonner toutes les ambitions d’Arnolphe, pensant que son ami est sur le point de se ridiculiser.

Georgette et Alain

Ce sont respectivement la servante et le valet d’Arnolphe. Totalement dévoués à leur maître, ils n’hésitent pas à refouler systématiquement les demandes Horace pour voir Agnès. Ils utilisent même un bâton si l’amant se présente beaucoup trop insistant.

Oronte

C’est un ami d’Arnolphe et le père d’Horace qui souhaite que son fils épouse la fille d’Enrique. Mais lorsqu’il découvre qu’Enrique est en réalité le père d’Agnès, il ne peut plus s’opposer au mariage d’Horace et de son amante.

Enrique

Il est en fait le beau-frère de Chrysalde, mais également l’ami d’Oronte. Ce n’est qu’à l’acte V qu’on découvre qu’il est le véritable d’Agnès.

Analyse de l’œuvre

Pour l’égalité des deux sexes

Cette pièce théâtrale est en réalité une critique de la représentation de la gent féminine qui était réalisée à l’époque de Molière. Au XVIIe siècle, on ne se mariait pas par amour, mais plutôt par prise de pouvoir et arrangement. À cette époque, les femmes sont traitées comme des êtres voués aux pêchers et à la traîtrise. Elles n’ont donc que deux trajectoires de vie possible : le couvent ou le mariage. La majorité d’entre elles n’ose se rebeller, puisqu’elles n’ont reçu aucune éducation.

La plupart des femmes n’est pas instruite pour les garder plus dociles, et de leur côté, les hommes croient qu’il vaut mieux épouser une fille naïve, car elle se présente aussi plus soumise. C’est tout ce côté de la société que le personnage Arnolphe symbolise. Toutefois, au même instant, le mouvement « La préciosité » voit son apparition. Ce dernier est composé de femme riche, instruite et libre qui revendique leur indépendance, leur autonomie, ainsi qu’une égalité entre les femmes et les hommes.

Cette pièce théâtrale de Molière est ainsi une représentation critique d’une société machiste du XVIIe siècle. Le vieux Arnolphe évoque les hommes qui désirent préserver les femmes sous leur joug. Quant à Agnès, elle figure les femmes bien nées qui désirent l’égalité entre les deux sexes.

Entre grivoiserie et obscénité

La pièce reprend pas mal d’éléments dramatiques propres au type de farce que Molière avait déjà utilisé dans ses pièces précédentes : un poncif du genre depuis le Moyen-Âge, le thème de l’infidélité des femmes et le quiproquo comme principal ressort dramatique. Les allusions grivoises décorant L’École des femmes contribuent aussi de cette veine comique farcesque, des allusions parfaitement perceptibles dans le titre de la pièce. En ce qui concerne le nom d’Arnolphe, il évoque une certaine plaisanterie classique qui le désigne comme le « patron des cocus ».

Les répliques des différents personnages contiennent également plusieurs allégories à caractère sexuel. Comme celle du valet qui précise vouloir « empêcher, peur du chat, que son moineau ne sorte ». Ici, le moineau est une façon cachée d’indiquer le sexe masculin. On a aussi la réplique d’Agnès qui explique à son tuteur avoir été inquiétée par les puces ; celles-ci renvoyant aux démangeaisons amoureuses dans la littérature comique et érotique de l’époque.

Création d’un tout nouveau genre de comédie

L’École des femmes ne se limite pas seulement à son univers grivois et farcesque. Son innovation réside dans l’ajout du « gros comique » dans une pièce en vers et en 5 actes. Dès que Corneille avait laissé de côté la comédie sentimentale qu’il avait créée, ce genre était uniquement interprété à l’adaptation de pièces étrangères, particulièrement italiennes et espagnoles. Placées sous l’invocation de Térence et de Ménandre, les comédies n’étaient pas destinées à faire rire. En effet, le comique y était intermittent, mêlé aux grands sentiments et aux intrigues de héros de convention. Les comédiens édifiaient aussi le spectateur en respectant le précepte horacien « placere et docere » qui se traduit par « plaire et instruire » en français.

Molière, de son vrai nom Jean Baptiste Poquelin, n’oublie pas cette dimension morale dans sa pièce qui pose la question de l’accès des femmes au savoir, de leur statut au sein de la société et de la famille, et même de leur instruction à la sexualité. Cette interrogation, faisant déjà débat à la Renaissance, connaissait alors un regain d’intérêt, grâce surtout à Mlle de Scudéry qui en avait fait le sujet de l’une de ses histoires.

Les termes de ce débat sont évoqués dans L’École des femmes par l’opposition entres Arnolphe, qui défend la position austère des catholiques, et de Chrysalde, qui défend la même position libératrice que le fondamental de ce public vaniteux auquel s’adressait l’auteur, et dont l’unique fonction dramatique permet de faire ressortir le risible des conceptions d’Arnolphe par contrepoint.

Querelle et succès fulgurant

Représentée le 26 décembre 1662 pour la première fois au théâtre du Palais-Royal, L’École des femmes connait instantanément un vif succès. La recette s’étant élevée jusqu’à 1 518 livres, une somme inédite pour cette époque. Les représentations suivantes n’ont fait que confirmer ce succès, même après que Sophonisbe, la nouvelle tragédie de Corneille avait été lancée.

Très rapidement, la pièce fut la cible de plusieurs attaques, suscitées sûrement par les frères Corneille qui auraient été renseignés par certains lecteurs affirmant qu’elle contiendrait des enfonces dirigés contre eux. Donneau de Visé reproche aussi dans ses « Nouvelles nouvelles » que Molière a emprunté son sujet à d’autres auteurs.

Malgré tout cela, Molière ne semblait pas inquiété et a même su en tirer bénéfice. Pendant la trêve de Pâques, il a fait imprimer le texte de la pièce, avec une préface dans laquelle il dévoilait la conception prochaine de La Critique de l’École des femmes. Il s’agit d’une comédie de salon exhibée comme une réponse à ses adversaires.

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